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l’ennemi, c’est-à-dire son irruption sur notre territoire, devra être suivie, à délai aussi court que possible, d’une vigoureuse riposte destinée à briser le premier choc de l’adversaire et à nous ouvrir les portes de son propre territoire. »

Comment préparer cette riposte ? Comment choisir judicieusement le terrain des premières rencontres, tout en perçant à jour les intentions de l’ennemi ? C’est à quoi s’appliquait le général, en opérant la synthèse des multiples indications positives qu’il avait pu recueillir, et en s’en tenant tout d’abord au secteur qui lui avait été confié. En dépit de « l’extension extraordinaire de la Mosel Stellung » qui peut permettre à l’Allemand d’ « adopter dans la zone Strasbourg-Metz une attitude défensive » et « d’y résister à un ennemi supérieur, » il croit à une violente poussée offensive allemande dans le secteur de la Moselle. « Cette offensive, disait-il, si elle est couronnée de succès, livre à l’invasion les portes de la trouée de Charmes et lui ouvre la voie la plus directe pour atteindre, par Neufchâteau, la vallée de la Marne. De plus, elle peut refouler pêle-mêle la masse française du Sud sur la masse du Nord, et les couper l’une et l’autre, comme en 1870, de leurs communications avec le cœur du pays. » Pour parer à ce grave danger, il y a lieu « de préparer le champ de bataille de la rencontre qui, selon toutes les probabilités, sinon selon toute certitude, se développera à l’Est de la ligne jalonnée par la Meurthe inférieure et la Mortagne. » A cet effet, il fallait s’assurer, par de préalables organisations défensives, de la possession de Nancy, — qui, vraisemblablement, et contrairement à l’opinion commune, ne sera pas attaqué dans les premiers jours de la guerre, — il faut aménager le Petit et le Grand-Couronné, et le plateau de Haye, de manière à constituer dans toute cette région une sorte de bastion défensif et offensif tout ensemble. L’armée qui agira sur ce front devra comprendre cinq corps d’armée, une ou deux divisions de réserve et deux divisions de cavalerie. « Cette armée devra être dotée d’une importante artillerie lourde, indépendamment des batteries fixes établies sur le Grand-Couronné. » Il sera bon aussi, afin d’appuyer notre droite au Rhin, et de retourner contre l’Allemagne les sentiments français des populations, de faire, dès le début des hostilités, une offensive limitée dans la Haute-Alsace. Enfin, il sera opportun de placer « sous un commandement, ou plutôt