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incendies allumés par les Allemands et y poser la première pierre de la nouvelle bibliothèque, il n’est pas sans intérêt de relire les beaux discours qu’il a prononcés aux États-Unis, soit pendant les hostilités, soit après l’armistice, et qui ont été publiés l’année dernière à New-York. Le 16 février 1918, par exemple, il s’adressait à la Chambre de Commerce de Saint-Louis, Missouri ; en recherchant les responsabilités de la guerre, il montrait lumineusement qu’elles incombaient tout entières à l’Allemagne, qui s’était arrogé des droits à la domination universelle et dont l’impérialisme devait fatalement, tôt ou tard, déchaîner un conflit général. Le 11 février 1919, à un banquet qui était donné, en l’honneur du Lincoln day, sous les auspices du Comité républicain du Comté de Passaic, Paterson, New Jersey, il étudiait, de haut, les problèmes de la paix et disait : « Le parti républicain insistera pour que les fruits de la guerre ne soient pas perdus et gaspillés ; pour qu’on n’écoute point l’insidieuse propagande de l’Allemagne ; pour que les tentatives manifestes auxquelles on se livre dans l’espoir de susciter la discorde entre l’Amérique d’une part et, d’autre part, la France, la Grande-Bretagne, l’Italie, et aussi les nations nouvelles comme les Tchéco-slovaques et les Polonais, n’aient aucune chance de réussir. Nous ne proposerons pas qu’une guerre qui a été gagnée par les armes soit perdue par des mots. Nous ne proposerons pas que les souffrances et les douleurs de la France, de la Grande-Bretagne, de la Belgique, de l’Italie, de la Serbie, ou celles de dizaines de mille de nos propres familles américaines, soient laissées sans les pleins résultats de la victoire (shall be left without the full results of victory). » Il exprimait, en même temps, le regret que la délégation américaine à la Conférence de la Paix n’eût pas plus rapidement fixé les conditions essentielles du traité, qu’elle n’eût pas cherché à aboutir « dans la splendide unité des Alliés, » si puissante au 11 novembre 1918 ; que cette délégation se fût perdue dans une multitude de détails oiseux, et qu’elle ne s’en fût pas tenue aux trois termes du programme français : Réparations, restitutions, sécurité.

M. Nicholas Murray Butler n’a pas varié dans ses opinions et la grande majorité du peuple américain est certainement dans les mêmes dispositions vis-à-vis de la France. Il nous appartient de consolider cette traditionnelle amitié de nos deux pays en prenant soin de ne laisser travestir, aux yeux de l’Amérique, ni notre conduite, ni nos intentions. Comme le disait M. Hugh C. Wallace dans son émouvant discours du 4 juillet, la France a été attaquée par un ennemi sans scrupules, décidé « à l’anéantir en tant que Grande Puissance, —