déterminé par une force naturelle toujours identique : la gravitation ; le troisième change tout le temps. Le système des plis d’une robe ample et flottante comme chez Watteau est déterminé par le conflit de ces trois forces contradictoires. D’ordinaire, chez la femme debout, il commence par tomber droit, de la nuque, le long du buste, raide, car il est ainsi voulu par la mode, puis au renflement des hanches il ondule, enfin subitement se casse, arrêté par un grand barrage, qui dérive toutes les lignes dans un sens horizontal, étant causé par le geste de la femme qui relève un peu sa traine ou par quelque autre mouvement. Tout à fait logique, dans son principe, Watteau est dans le détail d’une fantaisie et d’une diversité infinies. Il multiplie les cassures et les œils de plis, il froisse et chiffonne, tapote et fait bouffer toute la surface textile et, à chaque cassure, luit une étincelle, avec des effets de mica miroitant au soleil. Il transporte les effets ? aux robes, et ce sont des rides innombrables qui courent sur l’étoffe comme sur la surface d’un lac.
Chez l’homme, dans son travesti boudiné e « t collant, le pli souligne non plus la loi de gravitation, ni le mouvement, mais mille et mille fois répété, parallèle, en accordéon, il accuse le galbe solide d’une jambe, comme un tore ou un boudin fait celui d’une colonne. Parfois une cape, mais courte et oscillante masquant à peine une épaule, fait valoir l’ajusté comme le feuillage d’un bouleau la ligne svelte et précise du tronc qui le porte. Dans l’Indifférent, chaque pli emmaillotant les bras ou les jambes est un ressaut où ricoche la lumière comme les crêtes luisantes des vagues, qui se suivent sur la mer. Ainsi, la vie s’insinue partout. Parfois, de grandes surfaces sont à peine soulevées en des ondulations insensibles, où la lumière glisse et joue avec l’ombre, comme dans le grand Gilles ou Pierrot. Le plus souvent, soit brisée en mille facettes, soit creusée en ravines profondes, soit suspendue d’un genou à l’autre en guirlande, soit tombant en longue et fine trompette renversée de la tête aux pieds, l’étoffe a une animation naturelle. Elle ne l’avait pas avant Watteau et, après lui, chez ses imitateurs qui l’exagéreront en la tordant et en la chiffonnant, elle la perdra. Elle redeviendra un simple accessoire décoratif. Watteau seul, grâce à sa science de l’attitude génératrice des plis, aura su la lui donner.
Où a-t-il donc trouvé cela ? se demandent les exégètes, et ils