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définitivement anéanties. Quant aux usines, auxquelles ils ont rendu une vie factice, leurs jours sont comptés : les défauts de l’installation apparaissent ; on ne peut renouveler le matériel : il faut fermer. Sur le fond morne de la destruction générale, ces tentatives puériles font l’effet de pièces de soie sur les guenilles d’un pauvre.

On a fait grand bruit du train électrique de Machonine. Il n’a exécuté que deux trajets en tout et n’a jamais transporté que son inventeur et divers ingénieurs. Chaque trajet a coûté 130 millions de roubles. Plusieurs sous-marins ont été démolis pour la construction de ce train. Et tout cela sans utilité aucune. Cette fameuse « électrification » qui devait révolutionner l’industrie des chemins de fer, chaque fois que j’en ai parlé avec un ingénieur sérieux, j’ai surpris le même sourire de scepticisme et entendu la même question : « Y croiriez-vous, par hasard ? » On a dû en abandonner le projet, faute des matériaux nécessaires ne fût-ce qu’à la construction des locaux pour les futures stations électriques. L’insuccès complet des travaux de ce genre, entrepris depuis longtemps sur le Volchof et la Svir, la vue des travaux abandonnés à l’usine de réparation de Lublin, démontrent que l’entreprise est irréalisable.

En fait, les nouvelles optimistes données par les bolchévistes ne sont qu’une mise en scène destinée à tromper l’étranger. Elles sont article d’exportation. Un certain Kelly, ingénieur communiste américain, envoyé en Russie pour y inspecter les usines, nous dépeint de façon saisissante la situation désespérée de l’industrie bolchéviste. Son rapport, très documenté, conclut à l’impossibilité de reconstituer l’industrie en Russie, à cause de la destruction complète de l’outillage. À la suite de ce rapport, qui souligne consciencieusement le non-sens du système de gouvernement soviétique, Kelly fut envoyé dans un camp de concentration. Mesure radicale, qui ne suffit pas à améliorer la situation de l’industrie bolchéviste.


X. — L’ABOUTISSEMENT DU RÉGIME : LA FAMINE

Le ravitaillement est la pierre angulaire du régime. Les bolchévistes savent bien que l’existence même du bolchévisme en dépend. Or le résultat indéniable du système de ravitaillement bolchéviste est celui-ci : la famine installée dans les villes,