la distraction, projeta une partie de campagne. Plusieurs personnes y furent invitées, parmi lesquelles la famille Vantini, le général Drouot. Le jour désigné étant arrivé, l’Empereur s’embarqua, je ne me rappelle pas où, avec tous les invités. Son canot et le canot de suite étaient pleins. On alla dans un endroit de l’île assez éloigné et isolé. Le temps était magnifique, la mer fort douce. Le lieu où l’on s’arrêta était une plage fort agréable et des plus pittoresques ; des rochers, des arbres, des tapis de verdure et, peu loin de là, un charmant courant d’eau tombant çà et là en cascade était ombragé de bouquets d’arbrisseaux. L’Empereur s’installa à quelques toises de la mer et là, pour se préserver de l’ardeur des rayons du soleil, il fit dresser la petite tente de son canot, sous laquelle lui et ses invités prirent place autour d’un couvert champêtre. Sur une nappe étendue sur le gazon, on mit tous les mets qui devaient composer le déjeuner, et chacun, assis ou debout, se mit à manger. Suivant son habitude en de telles circonstances, l’Empereur servit les dames ; les Messieurs se servirent eux-mêmes ou furent servis par le maître d’hôtel. Le repas fut des plus gais, et, ce qui ne contribua pas peu à le rendre tel, c’est que l’Empereur l’animait encore par ses saillies pleines d’esprit, et les petites histoires qu’il savait si bien raconter. Jamais de ma vie je n’ai été témoin d’un spectacle aussi agréable que celui qu’a offert à mes yeux cette délicieuse matinée. Le repas champêtre, qui dura plus longtemps que les repas ordinaires, étant fini, l’Empereur demanda un fusil et se porta en avant de sa société, pour voir s’il ne trouverait pas quelque pièce de gibier à tuer. Rien ne paraissant sur quoi il put décharger son arme, quoiqu’il eût marché une demi-heure, il me rendit son fusil et alla s’asseoir sur le bord du courant d’eau à l’ombre du feuillage des arbrisseaux, et là il prit plaisir à mettre ses pieds dans l’eau et de l’agiter, tout en causant avec ceux ou celles qui étaient près de lui. Il resta environ une heure à la même place. Il aimait à sentir le frais de l’eau au travers de ses bottes, sans avoir les pieds mouillés. La journée était déjà assez avancée, lorsqu’il alla reprendre son canot et se mit en route pour retourner à Porto-Ferrajo.
Avant son arrivée dans l’île, l’Empereur avait été visiter la Pianosa ; il voulut de nouveau voir cette partie de ses possessions. Il fit le voyage. Comme je n’étais pas de service auprès