Quand l’Empereur eut connaissance de l’arrivée de la princesse sa sœur, il fit faire toutes les dispositions nécessaires pour la recevoir. Les pièces du premier étage, qui avaient été décorées, à peu près meublées, et qui étaient destinées à Son Altesse furent mises en ordre. L’Empereur lui-même pourvut à tout. Dès que le navire que montait la sœur de Sa Majesté fut entré dans le port et eut mouillé, l’artillerie de la place salua la princesse. La troupe, je crois, était sous les armes pendant son débarquement. Aussitôt que sa voiture fut à terre, elle monta dedans et vint descendre au palais. Lors de mon arrivée, Madame-Mère était déjà installée à Porto-Ferrajo ; elle occupait une maison située dans une petite rue voisine du palais.
La vie à Porto-Ferrajo était assez animée ; c’étaient les soldats du bataillon dont la ca-serne était voisine du palais, les ouvriers qui travaillaient çà et là, les allants et venants, quelques étrangers qui débarquaient journellement. Le dimanche, tout le monde, tant civil que militaire, était endimanché. Il y avait messe chez l’Empereur. Elle était dite dans le petit salon d’attente par l’archiprêtre, curé de Porto-Ferrajo, espèce d’évêque, je présume, car il était habillé de violet ; c’était un Corse de la vieille roche et quelque peu parent de l’Empereur. Les servants étaient l’abbé Buonavita et un jeune prêtre de l’île. Le Grand-Maréchal, le général Drouot et le général Cambronne étaient à droite et à gauche et un peu en arrière de l’Empereur. Les officiers de la Garde, les principaux fonctionnaires, étaient derrière et placés comme ils pouvaient. Comme la pièce était petite, la plupart restaient dehors. A l’issue de la messe, il y avait réception dans le salon. Tout ce qui était militaire était en grande tenue. Madame faisait dire la messe chez elle. M. Buonavita était son aumônier. Quant à la princesse Pauline, elle trouvait toujours moyen de se dispenser d’assister au service divin.
Ce jour-là, il y avait grand diner chez l’Empereur, c’est-à-dire quelques personnes de plus qu’à l’ordinaire. Habituellement, Madame y était, le général Drouot, deux ou trois officiers de la Garde et deux ou trois autres.
L’Empereur avait un jour dans la semaine où il allait diner chez sa mère. Les mets servis étaient cuisinés à l’italienne ; ils lui rappelaient les repas faits à la maison paternelle dans son jeune âge. Son Altesse avait pour maître d’hôtel un Corse