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l’accession de l’Autriche-Hongrie m’a paru être d’affecter de nous en désintéresser. » Ainsi, contrairement à ce que M. Crozier avait redouté dans sa lettre du 19 novembre 1911, le silence opposé par M. de Selves aux demandes financières de l’Autriche n’avait eu aucune influence « sur la rapidité ou la lenteur des formalités qui devaient précéder l’accession de l’Autriche-Hongrie au traité franco-allemand. » Le Gouvernement impérial et royal s’était décidé à donner sa signature, dès qu’il nous avait vus décidés à séparer les questions qu’il essayait de lier.

Le 13 janvier suivant, au moment où il allait quitter le quai d’Orsay, le ministre remerciait M. de Saint-Aulaire de ses dépêches, qu’il avait lues, disait-il, avec un intérêt particulier et il le félicitait de la clairvoyance avec laquelle il avait su, dans cette affaire, « pénétrer les mobiles du cabinet de Vienne, et de l’habileté dont il avait fait preuve en décourageant toute velléité de marchandage. » Et il concluait : « M. le ministre des Finances, à qui je me suis empressé de faire connaître les précisions contenues dans vos rapports, a prévenu les services de son ministère, par une annotation personnelle, de l’attitude que le Gouvernement comptait prendre en présence des sollicitations dont il pouvait être l’objet, à cet égard, de la part des établissements financiers. Cette attitude est en harmonie complète avec vos propres suggestions. »

Il n’est donc pas vrai que le Gouvernement autrichien ait jamais proposé à la France de se détacher de la Triple-Alliance. Il n’est pas vrai que M. de Selves ait reçu une proposition de cette sorte. Il n’est pas vrai qu’il ait accueilli, en principe, les demandes d’emprunt. Il n’est pas vrai qu’il ait cru qu’elles pussent nous permettre d’avoir une conversation plus générale sur des garanties d’ordre politique. Les pièces sont là pour démentir toutes ces fables.

Il n’est pas vrai non plus qu’il y ait eu le moindre changement d’orientation dans la conduite de nos affaires extérieures après le départ de M. de Selves. Son successeur a gardé vis-à-vis de l’Autriche l’attitude qu’avaient observée avant lui tous les ministres des Affaires étrangères. Il a cherché, comme eux, à entretenir avec l’Autriche les relations, non seulement, ce qui va sans dire, les plus pacifiques, mais les plus amicales, et, au cours de la crise balkanique, comme jusqu’à la veille de la guerre, il est resté en pleine confiance avec le comte Szecsen. Il serait aussi facile de faire cette démonstration, à l’aide de do-cuments authentiques, qu’il l’a été tout à l’heure de détruire la légende des propositions autrichiennes. La France, sans