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REVUE LITTÉRAIRE

LES CHAPELLES LITTÉRAIRES [1]

M. Pierre Lasserre est un critique de bonne foi. Il ne demande qu’à aimer et admirer ; seulement, il n’aime ou n’admire qu’à bon escient.

Bref, il lut les ouvrages de M. Paul Claudel, de M. Francis Jammes, de Charles Péguy, et ne les approuva point en bloc. Il publia ses jugements et fut un peu surpris d’entendre qu’on posait, avec une vive inquiétude, la question de savoir ce qu’allaient dire les « amis » de ces écrivains. Quels amis ? Leurs amis particuliers ? Non : pareillement, négligeons l’opinion des « oncles, tantes, cousins et cousines. » Alors ? « Ce dont il agissait, c’était d’une sorte de parti conjuré, garde de zélotes ou de mamelucks littéraires, qui s’est formée autour de certains auteurs d’aujourd’hui, au premier rang desquels Paul Claudel, le plus fanatiquement servi par ces pourvoyeurs de renommée. » M. Lasserre fut injurié par la bande des Claudeliens d’une magnifique manière. « S’il m’était possible de citer ces injures, dit-il, on verrait ce qu’elles ont d’instructif et le jour qu’elles jettent sur la nature, les ressorts et les dangers de l’influence intellectuelle exercée par M. Claudel. Le caractère de faiblesse agitée, de désordre logique qu’on ne peut faire autrement que de remarquer en elles, constitue un document expressif et probant où se dénote la qualité des esprits sur lesquels la littérature claudelienne, avec ses barbares moyens de tumulte verbal et de fascination matérielle, possède la plus forte emprise. » M. Lasserre, qui venait de lire M. Paul Claudel, connut ainsi les Claudeliens.

  1. Pierre Lasserre, Les chapelles littéraires (librairie Garnier).