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élèves les plus faibles parmi ceux qui ont fait du latin. Vraiment enfin elle sollicite trop peu l’effort de l’esprit. — Restent les sections A et C. Dans les grands lycées, elles se partagent les lions élèves, la première attirant ceux qui ont le goût des lettres et se destinent à des carrières dont les lettres ouvrent l’accès, la seconde ceux que les grandes Ecoles fascinent. Mais, dans les établissements de moindre importance, A devient squelettique. Par une conséquence imprévue, la faiblesse du recrutement a discrédité peu à peu un enseignement que l’on destinait à une élite, et il arrive que A recueille aujourd’hui ceux que C décourage. C’est le contraire de ce qui se passait autrefois, où on était « précipité » dans les sciences, quand on ne réussissait pas en lettres. C mène à tout, comme on dit. Et, en outre, C représente une harmonie, quoique imparfaitement réalisée, des lettres et des sciences.

Voilà à quoi aboutit une réforme qu’on avait prise pour une solution, et qui s’est trouvée n’être qu’une expérience. On avait dit aux parents, aux élèves : Choisissez. Et ils ont choisi, et ont choisi ce qui ressemblait le plus à l’enseignement secondaire de 1802 : « le latin et les mathématiques. » Frary disait que le latin disparaîtrait le jour où l’on aurait le choix entre lui et quelque chose d’autre. Frary s’était trompé. Cette expérience a, en outre, aboli le pré-jugé qui a vicié la pédagogie du XIXe siècle, celui de l’incompatibilité des études littéraires et des études scientifiques. Ce préjugé s’étendait au delà du lycée, et il y avait comme un divorce, par consentement mutuel, des sciences et des lettres. Elles se rapprochent visiblement aujourd’hui les unes des autres. Un romancier pousse ce besoin de rapprochement jusqu’à émettre ce paradoxe que tout écrivain doit avoir fait ses spéciales. Au lycée, en tout cas, les professeurs de sciences proclament la supériorité de ceux de leurs élèves qui ont fait de fortes études littéraires, et réciproquement. Les professeurs de phi-losophie ont également une prédilection pour les élèves de sciences, qui concorde avec l’orientation présente des études philosophiques. Les élèves, de leur côté, pour obtenir des points de plus dans certains concours, prennent volontiers le baccalauréat « philosophie » avec le baccalauréat « mathématiques. » Nous retrouvons donc, après l’épreuve du morcellement, l’unité de l’enseignement.

Unité ou dualité ? M. Appell, d’après une interview reproduite