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Une femme, les mains jointes,
Se soulève sur ses pointes.
Un vieux monsieur tend le cou,
Grave et pâle comme un fou.

Brusquement, dans la ligne droite,
Un bonheur effrayant miroite :
Le vert toujours mène le train.
Frémis, bouillonne, ô vie étroite,
Brise ton couvercle d’airain !
Mais, sans même un coup de cravache,
Sans presser le sort du talon,
Le rouge imprévu se détache,
Gonflé de vent comme un ballon.
Et sa victoire est si facile,
Si gracieuse, qu’on dirait
Le rapide salut scintillant d’un fleuret.
Cependant, sous le choc, la foule entière oscille,
Comme un boxeur hors de combat.
Le volet du destin lourdement se rabat.
L’espoir perdu n’a plus d’asile.




Plus d’asile ? Allons donc ! Tous ceux qu’il a trompés,
Oublieux, dès ce soir, lui rouvriront leur porte.
Lui, cherchera le cœur sous les habits râpés,
Et, l’ayant pris dans sa main forte,
Il vous l’endormira comme on berce un enfant.
Plus d’asile, l’espoir, parce qu’un rêve avorte ?
Hélas ! il est moins cher à l’homme triomphant !

Dans la fraîcheur crépusculaire,
Dans l’accablement du retour,
Plus d’un exhale sa colère
Contre la trahison du jour.

Sous le toit des feuilles obscures,
Entre les tristes noisetiers,
Pas trébuchants, sombres figures,
Ils ont repris les vieux sentiers.