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Cependant, au-dessus de l’océan des têtes,
Le soleil dans les cieux préside à d’autres fêtes,
Loin, très loin, par delà de fins cirrus d’argent ;
Et, parfois, comme un dieu dont le regard s’incline,
Il laisse du bois jaune à la jaune colline
Errer son sourire indulgent.

Les tribunes, là-bas, avec leur foule claire,
Imitent les frissons des espaliers en fleurs.
Oriflammes et mâts, tout a dessein de plaire.
Le monde, secouant sa chaîne séculaire,
Semble s’être affranchi des pleurs.

On dit que la vie est grise :
Ouvre les yeux, tu verras
Une casaque cerise
Effleurer le gazon ras.

La vie est, dit-on, pesante ?
Vois cette loque citron
Qui, légère, se présente
A l’entraîneur du baron.

Le cœur libre de scrupules,
Vois ces coursiers éclatants,
Vifs comme les libellules
Sur la mousse des étangs.

Qui parle de suicide ?
Mourir, c’est tout perdre au jeu.
Ponte sur ce vert acide
Qui tourne et qui se décide
Comme un pistolet fait feu.




Ils partent. — Un grand cri sort de toutes les bouches,
Jailli du fond de l’être, impudique, animal,
Pareil au soupir de la femme en couches,
Au hurlement du chien qui lutte avec son mal.