Passe une promeneuse matinale : une écharpe, un sourire, un jeune visage !
Une jeune ingénue en ce lieu se vient rendre,
Et goûter la fraîcheur sur ces bords toujours verts.
Son voile au gré des vents va flottant dans les airs ;
Sa parure est sans art ; elle a l’air de bergère,
Une beauté naïve, une taille légère [1].
Au revoir, la jeune ingénue ! Et pour gagner Chierry, il traverse les prés. A ce moment, nouvelle rencontre : c’est une gentille laitière qui se rend au marché de Château-Thierry.
Perrette, sur sa tête ayant un pot au lait
Bien posé sur un coussinet,
Prétendoit arriver sans encombre à la ville.
Légère et court vêtue, elle alloit à grands pas,
Ayant mis ce jour-là pour être plus agile
Cotillon simple et souliers plats [2].
Il salue cette personne pressée et distraite et continue son chemin en écoutant sonner Louise, Anne et Marie, les trois cloches de l’église de Chierry [3]. Il traverse le village et jette un regard par-dessus la haie vive qui enclôt les petits jardins :
Là croissoit à plaisir l’oseille et la laitue,
De quoi faire à Margot pour sa fête un bouquet,
Peu de jasmin d’Espagne et force serpolet [4].
Il descend vers le rû par où s’écoulent à la Marne les eaux de sa fontaine, la Fontaine du Renard. Il muse près des saules.
Le long d’un clair ruisseau buvoit une colombe.
Le promeneur approche ;
La colombe l’entend, part et tire de long [5].
Maintenant le sentier gravit le coteau, en remontant le cours du ruisseau qui, sous les ombrages du bois Pierre, écume et
- ↑ Le fleuve Scamandre.
- ↑ La laitière et le pot au lait.
- ↑ Elles avaient été baptisées le 20 août 1628, et Charles de La Fontaine avait été le parrain de Louise. Le procès-verbal du baptême des cloches de Notre-Dame de Chierry m’a été communiqué par M. Pommier, membre de la Société historique et archéologique de Château-Thierry.
- ↑ Le jardinier et son seigneur.
- ↑ La colombe et la fourmi.