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variées et dont certains n’ont nullement besoin, pour se produire, de l’introduction de substances étrangères dans l’organisme. Le « choc hémoclasique » montre qu’il y a quelque chose de commun entre tous ces phé-nomènes pathologiques qu’on croyait sans lien ; son étude constitue un moyen de diagnostic d’une précision et d’une fécondité remarquables, et qui par surcroît, comme nous le verrons, permet d’annoncer les troubles morbides qu’il concerne dés avant leur apparition.

Telle est, si j’ose ainsi la résumer d’un mot avant que de l’exposer, la contribution ré-cente apportée à la reconnaissance et à la définition des maladies par le professeur Fernand Widal et ses collaborateurs. Ceux-ci, MM. Abrami, Brissaud, Joltrain, Jancovesco, Pasteur-Vallery-Radot, ont, chacun pour sa part, contribué à l’œuvre du maître. Dans ce que nous allons exposer maintenant, il n’est guère de recoin où ces savants n’aient apporté l’aide de leur science et de leur habileté expérimentale. Leurs noms méritent d’être inscrits au fronton de l’édifice qu’a conçu et qu’orne chaque jour davantage la pensée profonde et magistrale du « patron. »

Certes, plusieurs des phénomènes d’ébranlement sanguin que désigne le « choc hémoclasique » avaient déjà été observés par occasion, et en quelque sorte sporadiquement. En particulier, un savant éminent, le professeur Delezenne de l’Institut Pasteur, a eu le mérite de montrer dès 1898 que plusieurs substances telles que les venins, les diastases, la peptone, etc., malgré leur diversité chimique, produisent sur le sang des effets identiques. Mais quelques pierres de taille jetées au bord du chemin ne constituent pas une maison. Ce sera la gloire de M. Fernand Widal d’avoir ici multiplié les pierres de taille et de les avoir juxtaposées harmonieusement en un précieux édifice, de les avoir réunies par le ciment d’une idée générale pénétrante, d’avoir posé solidement, à la base, l’expérimentation la plus ingénieuse. Henri Poincaré l’avait déjà dit, il y a longtemps : une accumulation de faits ne constitue pas plus une science qu’un tas de pierres n’est une maison. Tycho-Brahé connaissait admirablement, d’après ses observations, les positions dans le temps et l’espace de toutes les planètes ; mais il a fallu attendre Kepler pour que fussent énoncées les lois de Kepler, pourtant implicitement contenues dans les observations de Tycho. Les faits d’observation ont besoin, eux aussi, de l’ « animateur, » sans quoi ils demeurent inertes et inféconds.

Les accidents d’anaphylaxie provenant des injections de sérum se produisent dans des conditions de simplicité et aussi de brutalité que