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fait la vraie et durable renommée de son pays ne saurait les ignorer, ni les laisser étouffer sous l’insolente et fugace clameur des petites misères de l’ « actualité quotidienne. »

L’art médical... Mais déjà ma plume s’arrête. La médecine n’a-t-elle pas, ne va-t-elle pas cesser d’être un art pour devenir une science ? Il semble que cet heureux temps n’est pas loin où l’habileté, la finesse, le « flair » du praticien céderont en grande partie la place à la sûreté et à la rigueur des méthodes techniques. « C’est, a écrit très justement M. Fernand Widal, en appliquant les méthodes des sciences physiques et naturelles que la médecine devient elle-même une science. » Le nombre des cas pathologiques où ces méthodes sont aujourd’hui appliquées est encore restreint ; notre objet est précisément aujourd’hui de montrer comment il a été récemment agrandi par le savant même qu’avaient déjà illustré la découverte géniale du séro-diagnostic, et tant d’autres travaux pénétrants.

Donc la médecine, — art qui tend à devenir science, — a pour objet de reconnaître et de définir les maladies, puis de les guérir. Ici comme à la guerre, reconnaître la position de l’ennemi est la condition nécessaire pour le battre. Certes, dans le traitement des maladies comme dans le combat il peut arriver qu’on porte des coups efficaces sans savoir exactement pourquoi ils le sont et où ils tombent. Entre cette manière de combattre à l’aveuglette et celle qui a reconnu d’abord les objectifs, il y a toute la différence qui sépare l’empirisme de la science, la médecine d’hier de celle de demain. Dans le combat contre la maladie, cette ennemie éternelle du genre humain, comme dans la guerre proprement dite, le « repérage » est donc la première et principale condition du succès.

Or, précisément les travaux récents du professeur Widal et des savants qui l’entourent viennent de nous fournir une méthode nouvelle et qui paraît très générale, permettant de repérer une foule de troubles, de malaises, de maladies, d’états pathologiques que l’on croyait naguère disparates et sans lien entre eux, que la nouvelle méthode médicale réunit sous une même rubrique et qu’elle nous apprend à démasquer prématurément.

Jusqu’en ces derniers temps, on attribuait à l’ « intoxication » un grand nombre de troubles pathologiques, en particulier tous ceux que causent des substances étrangères introduites dans le corps humain et en outre la plupart des maladies microbiennes. Le caractère principal des intoxications, — des empoisonnements, comme on dit vulgairement, — est que le poison a sur les cellules organiques une