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troupes seront arrivées au lieu convenu et le grand général Jean-Casimir Sapieha engagé par écrit à faire la guerre à ses côtés, tant qu’il le jugera nécessaire. Le grand général doit lui dépêcher quinze cents chevaux, et Conti lui expédie pour cela dix mille écus qui seront rabattus sur la somme totale. Il aura ainsi une armée de dix mille hommes que l’on dit « assez bonne ; » et, s’il ne l’a pas, il n’aura « hasardé que dix mille écus. » En attendant, il a levé à prix d’argent deux mille cavaliers au nombre desquels il compte quelques compagnies de hussards de l’armée de la couronne qui se sont déclarées pour lui.

Bien que la diète de Varsovie le proclame roi pour la seconde fois et décide de lui envoyer une ambassade, il a peu d’espoir. L’armée de la couronne a reçu de l’argent de l’Électeur ; elle ne marchera en faveur de Conti que si l’armée de Lithuanie lui donne l’exemple. Malheureusement, « tout cela est aussi douteux que la foi de son général. »

« A la fin j’ai trouvé un honnête homme ! » s’écrie l’infortuné candidat qui rend hommage à l’intégrité du palatin de Kiovie, mais ne s’accoutume pas à la vénalité des autres. Le maître des cérémonies s’est bien gardé de remettre à leur destinataire cent mille livres que Châteauneuf lui a confiées pour le cardinal, et il répond à toutes les réclamations qu’il les a dépensées au service du « sérénissime » Roi. « Vous avez grand tort, mande le prince à sa femme, si vous croyez que je suis de bonne humeur ici : je n’y entends que des plaintes, je me vois reprocher tous les jours ou de bouche ou par écrit toutes les fautes des autres, j’y meurs de froid, je fais mauvaise chère, et je ne prévois qu’un dénouement désagréable. » Le bruit de sa mort court le pays.

Déjà Conti songe au départ, au portrait enrichi de neuf ou dix mille francs de pierreries qu’il donnera à Jean Bart pour l’avoir conduit en Pologne et peut-être ramené en France ; à la joie de certaines gens, s’il ne revenait jamais et se noyait dans la mer Baltique.

Louis XIV d’ailleurs approuve jusqu’ici sa prudence. Et voici les encouragements qui arrivent par la poste. « Si les choses sont disposées dans le pays où vous êtes, écrit le marquis de Lassay, comme elles nous paraissent ici, vous n’avez point d’autre parti à prendre que celui de revenir. »

Le 29 octobre, l’évêque de Plock, le palatin de Kiovie, les castellans de Siradie, de Dantzick et de Brzest lui avouent