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répond de ne rien changer à ses habitudes ; et Fleury s’asseoit comme à l’ordinaire.

Louis XIV écrivit à Polignac, le 30, que Conti partirait, aussitôt que l’on connaîtrait exactement l’état des affaires en Pologne. Conti de son côté écrivit au cardinal-primat qu’il ne se rendrait en Pologne que lorsque les Polonais auraient pris la peine de lui notifier son élection.

Louis XIV avait beau dire que tous les Polonais le voulaient pour roi, le prince de Conti s’en tenait à ce qu’il avait écrit à sa femme, quelques jours auparavant : « La grande trésorière de Lithuanie ne vous traite pas de reine dans sa lettre, et l’on peut juger par là que notre royauté n’est pas trop reconnue en Pologne. » Outre le Roi et les ministres, il allait trouver Mme de Maintenon : « Enfin, mandait-il à la princesse de Conti, j’ai eu... cette conversation que vous avez tant désirée ; elle a été telle que je la pouvais souhaiter, et vous aussi... Je vous assure que cette affaire commence à me peser cruellement... J’ai la tête si rompue que je n’en puis plus. » Et cependant la princesse supplia Mme de Maintenon d’obtenir l’ajournement du voyage de Pologne, dans une lettre qui commence par cette phrase : « Jugez, Madame, de l’état où je suis, puisque je me résous, pour la première fois de ma vie, à cacher quelque chose à M. le prince de Conti. » Mais le perfide Lassay, qui a publié la supplique dans le second volume de ses œuvres, a mis au-dessus ce titre révélateur : Lettre que Mme la princesse de Conti, de concert avec M. le prince de Conti, voulut que je lui fisse pour Mme de Maintenon.

Conti attribuait le demi-échec de l’affaire à la mauvaise foi de Polignac envers les Polonais. Polignac, au contraire, l’attribuait à l’absence du prince et à celle de l’argent. Quel tableau que celui des embarras de l’ambassadeur : le grand général de Lithuanie Sapieha, dont les troupes ne sont pas payées, déclarant qu’il s’est engagé à élire le prince de Conti, non à le soutenir ; le parti français, avide de recevoir enfin l’argent promis, fixant le versement au 30 juillet ; Holvel, le banquier de Dantzick, faisant remarquer, à la veille de l’échéance, qu’il n’est obligé d’avancer les trois millions, sur lesquels on compte, que si le prince de Conti est seul élu !

Depuis le 1er août, l’électeur de Saxe règne paisiblement à Cracovie. Il a promis de donner six cent mille écus à l’armée