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de Siradie, de Rava, dans ceux de Prusse, qui répètent à leur tour : Vive Conti ! Vive Conti ! Les amis de Polignac se croient autorisés à presser le cardinal de proclamer Conti, malgré les opposants, car le reste des palatinats est partagé entre « la maison royale, Neubourg et Lorraine. »

Cette noblesse impatiente va-t-elle anticiper l’élection ? Le castellan de Kulm semble le craindre. En agent zélé de Frédéric-Auguste, il s’efforce d’arrêter les palatinats de Prusse. Il leur parle en faveur de son maître, mais Czapski, chambellan de Marienbourg, décharge sur lui son pistolet en criant : « Traître, sont-ce là tes serments ? » et ne le manquerait pas, si un prêtre, avec sa canne, ne relevait le canon de l’arme.

Mais dans le vaste champ électoral, quinze palatinats ont crié : Vive Saxe ! Aussitôt Pryemski, castellan de Kalisch, accourt à cheval et les adjure d’une voix pathétique : « Quoi, mes frères, vous élisez un hérétique ! qu’est devenu votre zèle pour la religion ? Vous oubliez donc vos serments et vos promesses ? Ah ! mes chers frères, ce n’est pas à nous que vous êtes engagés, mais à Celui-ci, » et il tire de sa poitrine un crucifix : « Quoi ! vous vous déclarez pour l’ennemi de ce Dieu mort pour nous sur la croix ! »

Emus par son éloquence théâtrale, ces gens, qui ont acclamé l’électeur de Saxe, reviennent en moins d’une heure au prince de Conti, et d’autant plus rapidement, qu’ils n’ont crié : Vive Saxe ! que sur le conseil imprudent ou perfide du fils de Sapieha, et sous prétexte de ne pas effaroucher les partisans de Frédéric-Auguste. Mais, excités par Przebendowski, les autres palatinats protestent qu’on veut violer la constitution en proclamant le Roi sans attendre leurs suffrages ; et le cardinal, pour respecter les lois qui veulent que le Roi ne soit proclamé que le dernier jour de la diète, et dans l’espoir de ramener les dissidents, remet la proclamation au lendemain.

Les discussions ne cessent pas sur la religion de l’électeur de Saxe. Le parti français soutient qu’il est luthérien, le parti saxon réplique qu’il ne l’est plus et montre l’attestation de l’évêque de Javarin.

Après une nuit que le castellan de Kulm passa à traiter avec les partisans des autres candidats en faveur de Frédéric-Auguste, la journée du 26 juin commença par une messe, que le cardinal-interroi célébra solennellement à Varsovie dans la