sans exiger l’extrait du casier judiciaire, ni se préoccuper de la croyance de ses clients. Elle ne prêchera son Dieu que silencieusement, et elle est assez magnifique pour qu’on ne puisse pas ne pas apercevoir en elle un rayonnement divin. Cela durera des années, peut-être beaucoup d’années. Elle a tout l’avenir devant elle ; la France aussi : on peut attendre. Sûrement, joignant ses efforts à ceux que j’ai dits déjà, elle nous obtiendra ce beau triomphe : que les peuples musulmans, sans accepter encore la doctrine chrétienne, en auront du moins l’intelligence, l’estime et, çà et là, le désir secret. Et si, plus tard, des âmes musulmanes, persuadées ainsi qu’il n’y a rien dans l’Islam qui vaille la France charitable et religieuse, en venaient à dire : « Apprenez-nous la loi qui vous fait le cœur si grand ? » quel bien pour l’Etat, quelle francisation de l’Afrique du Nord ! Ce serait un monde régénéré, une France prolongée, notre pouvoir reconnu, l’avenir assuré, et la plus haute gloire qu’une nation civilisée puisse vouloir et obtenir : la création à son image !
Ici, nous nous heurtons à l’objection banale : les musulmans, en fait, ne se convertissent pas ; il n’y en a, pour ainsi dire, point d’exemple. C’est une erreur moins grave que de prétendre qu’ils ne peuvent pas se convertir : c’en est une cependant.
Toute la vie d’apostolat du Père de Foucauld a été fondée sur la conviction qu’il est possible, au contraire, par la prière, l’exemple, une prédication qui tient compte de l’ancienneté de leur erreur et de la faiblesse d’une pauvre volonté humaine en lutte contre des siècles et contre un peuple entier, d’amener peu à peu les musulmans à la pleine grâce du Christ.
La difficulté n’est pas tant de persuader un musulman de la vérité de la religion chrétienne, que d’assurer la persévérance du converti. Les Arabes devenus chrétiens ne peuvent plus vivre où ils vivaient. Ils sont hors la loi. Tout est mis en œuvre pour qu’ils abandonnent la foi nouvelle. Leur vie même est menacée, et la crainte de les voir apostasier, c’est-à-dire se charger d’un crime énorme, est la raison première qui a empêché bien des fois les missionnaires d’accueillir la demande des catéchumènes, et de les baptiser. Le temps de la préparation collective à recevoir la foi ne peut être court. Il faut changer l’esprit public avant d’achever les conversions individuelles. L’habitation