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intérieur. Après un séjour d’une dizaine de jours, l’Empereur retourna à Saint-Cloud où il resta quelque temps. Le départ pour la campagne de Russie approchait.

L’Empereur était à Saint-Cloud lorsqu’il reçut le général Lefebvre-Desnouettes qui s’était échappé d’Angleterre. L’Empereur était à diner. Il accueillit d’abord assez froidement le général, et lui fit le reproche d’avoir compromis ses chasseurs à l’affaire de Bénavente. Celui-ci se justifia le mieux qu’il put et ensuite raconta son histoire, depuis qu’il avait été fait prisonnier jusqu’à son retour en France. Je crois me rappeler que ce fut une dame anglaise qui favorisa son évasion. Le résultat de la visite du général fut que l’Empereur lui rendit le commandement des chasseurs.

A Sainte-Hélène, un officier anglais qui avait été à Waterloo, dit en parlant des chasseurs de la garde, qu’ils avaient été l’admiration des corps anglais qui s’étaient trouvés devant eux, et il ajouta : « Ces vaillants soldats étaient autant de lions. Ils avaient à leur tête le général Lefebvre-Desnouettes. »

Je n’ai plus aucune souvenance de ce qui s’est passé dans le temps qui a précédé le départ pour la campagne de Russie. D’après quelques notes que j’ai recueillies, ce fut le 9 mai 1812 que l’Empereur partit pour Mayence avec l’Impératrice ; Roustan était sur le siège. On m’avait envoyé en avant à Metz, où l’Empereur s’arrêta et passa la nuit. Le lendemain matin, il en partit d’assez bonne heure. Ce jour-ci je l’accompagnai. Le soir nous arrivâmes à Mayence. Ce fut la première course que je fis sur le siège de la voiture de l’Empereur.


II. — L’INCENDIE DE MOSCOU

[Saint-Denis traversa toute l’Allemagne par Wurtzbourg, Dresde, Glogau, Posen, Thorn, Dantzig, Königsberg, devançant, suivant ou accompagnant l’Empereur, selon le roulement du service. Après le passage du Niémen, ses principales étapes furent Wilna, Witepsk, et Smolensk. Pendant la bataille de la Moskowa, il était campé avec les bagages de la Maison en deçà de Mojaisk et il fut frappé du nombre considérable de blessés et particulièrement d’officiers ou de généraux qui vinrent se faire panser à l’arrière ; « aussi les soldats disaient : « Ah ! aujourd’hui, il y en a pour tout le monde. » Les Russes chassés du champ de bataille, ordre fut donné aux équipages de se diriger sur Moscou.]