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et mis sous vitrine. Ils sont fiers de leur effort actuel et ils envahissent triomphalement l’avenir. Gabriele d’Annunzio, quand il célèbre l’Italie du moyen âge ou la Venise des Doges, y met surtout en lumière des exemples singuliers d’énergie, voire de férocité guerrière, des types de surhumanité qu’il propose à l’imitation de ses compatriotes. Ce qu’il exalte surtout dans sa Venise, c’est l’Italie de l’avenir, l’Italie maritime, la Maîtresse de la mer... Une telle façon de concevoir les choses est assurément aussi légitime qu’admirable. Celle de M. Henri de Régnier n’en est pas moins plausible. Et, s’il admet la première, comme je n’en saurais douter, il réclame la même indulgence pour la sienne. Dans son idée, et dans celle de son lecteur, l’Italie qu’il dépeint est aussi vivante, peut-être même davantage, que celle du présent. En tout cas, l’essentiel est qu’il la sente et qu’il nous la rende comme telle.

Et, à ce sujet, il n’est sans doute pas inopportun de rappeler ce qu’il faut entendre, ce que j’entends quant à moi, par la vie en art et en littérature. Certains critiques se sont appliqués à déformer ma pensée, en m’attribuant je ne sais quel culte orgiastique de la vie, — « la Vie, » par une Majuscule, — la vie à laquelle je sacrifierais tout : la raison, l’intelligence, le goût, la beauté et je ne sais quoi encore. J’admettrais en art les pires difformités, horreurs, anomalies, ou vulgarités, sous prétexte que cela existe, que cela est de la Vie...

Mais c’est confondre le vivant avec le réel, la vie avec la nature. La vie, pour moi, est déjà une pensée, un art, un ordre et une tradition. Choisir dans le réel ce qui vit, — et l’art est essentiellement un choix, — c’est choisir ce qui porte les marques mêmes de la vie : l’organique, l’ordonné, l’intelligible, l’harmonieux, le traditionnel. Tout le reste doit être écarté, passé sous silence, ou subordonné, comme voisin du non-être... Et la vie n’est pas enfermée dans l’instant qui passe. Elle totalise tout le passé, comme elle est grosse de tout l’avenir. Ainsi, tel héros du passé, dont l’action se perpétue et se perpétuera indéfiniment, — un Louis XIV, un Napoléon, — est beaucoup plus vivant que les plus agités de nos contemporains...

M. Henri de Régnier se rallie, j’en suis sûr, à cette conception de l’art. Du moins, l’Italie vivante qu’il aime et qu’il nous décrit est une Italie de choix, dont il a démêlé quelques traits essentiels, particulièrement dignes à ses yeux d’admiration et