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région des îles d’or, des monts poussinesques, des salins étalés et luisants et des pinèdes sur la mer. Outre M. Montenard, qui ne l’a jamais quitté et qui expose encore cette année un Vieux pont et des Genêts en fleurs tout pénétrés de cette lumière attique, il y a M. Dauphin, qui s’attarde le Soir aux environs d’Hyères et cherche à rendre l’impression qu’on ressent quand le soleil disparaît sous la brume, du côté de Toulon et que les cyprès posés en sentinelles à l’entrée des mas prennent insensiblement l’allure de drapeaux serrés dans leurs gaines noires et lustrées. Il y a M. Henry Bouvet, qui rend avec justesse le contraste des rochers rouges et de l’eau bleue, aux Environs de Toulon, M. Communal, qui est descendu, un instant, de ses glaciers pour étudier, au pastel, un Effet de soleil sur les pins parasols du Ceinturon à Hyères, et M. Lambert qui a fait l’ascension de la rocca de la même ville, pour y découvrir sur des entassements de blocs de roches et de forêts de fleurs, dans une orfèvrerie de lichens et une cohue de cactus, l’étonnante silhouette de la Tour Jeanne. Il y a Mlle Valentine Pèpe, qui est allée à Porquerolles et expose, aux Artistes français, ce qu’elle y a vu. Il y a, enfin, au même Salon, M. Amédée Buffet, qui a découvert, au milieu de la plaine de la Bocca, près de Cannes, cet îlot, l’ermitage de Saint Cassien, qu’on dirait apporté de la campagne romaine et posé là comme un cadeau de l’Italie.

Aussi, l’Italie est-elle un peu délaissée. Seul, ou à peu près, M. Bernard Harrison nous en donne une transcription fine et juste. Dans sa Vérone au crépuscule, on éprouve le soleil, le silence et la solitude profonde de ces cités glorieuses et surannées, où l’Art a tant fait qu’on ne peut plus y vivre que de souvenirs ; l’eau verte et bleue du fleuve semble à peine capable de charrier les pétales orangés tombés des dernières roses du ciel, tellement elle est paresseuse, et l’on ressent soi-même une béatitude exquise à imaginer l’heure ainsi indéfiniment suspendue. Dans la même salle, M. Achener montre une vue des Jardins Boboli, mais il a été inspiré surtout par l’entrée de Bagatelle, sous les feuillages d’automne, un des coins aux portes de Paris qui nous donnent précisément le mieux l’impression, non du style, ni des horizons, mais du repos lumineux des terrasses d’Italie.

A part ce peu d’exemples, et un joli effet de lune, à la porte de l’Ara cœli à Rome, de M. Rosset-Granger, l’Italie n’attire plus comme autrefois. Peut-être est-elle trop près. Nos artistes sont