pas du connu à l’inconnu, il désigne l’objet et le nomme sans recourir à la traduction d’une langue en une autre. Puis, avec les mots appris directement de la sorte, il construit des phrases très simples jusqu’à ce que l’élève, complètement familiarisé avec l’esprit de la langue qu’on lui apprend, arrive à s’exprimer sur tous les sujets courants de la conversation sans être obligé à de pénibles transpositions.
Il est incontestable que cette méthode, qui est en usage dans toutes les écoles Berlitz, donne chez les adultes des résultats surprenants. En quelques semaines, elle permet d’apprendre une langue étrangère et de la parler avec une certaine aisance. — C’est vrai, répondent les adversaires de la méthode directe ; mais l’adulte connaît déjà le mécanisme de sa langue maternelle, il sait ce qu’est une grammaire, une syntaxe. Chez lui, l’adaptation aux règles d’un langage nouveau se fait presque automatiquement. Tandis que chez l’enfant tout est mystère dans l’art d’assembler, des mots pour construire une phrase compréhensible. Ce n’est donc que dans sa langue maternelle qu’on peut lui faire comprendre ce que sont un sujet, un verbe, un attribut, et ce n’est encore que dans cette langue qu’il sera possible de lui donner cette instruction générale dont l’acquisition présuppose, non seulement la connaissance de quelques mots, mais encore la compréhension totale des enseignements du maître. Si, des connaissances ordinaires et pratiques, nous passons à l’enseignement de la morale et de la religion, le danger de l’inintelligence s’accroît encore dans des proportions tout à fait alarmantes. Il s’agit là, en effet, de concepts philosophiques et abstraits que seule la langue maternelle peut rendre accessibles aux enfants.
Voilà l’objection. Sur elle s’en greffe une autre, de moindre importance. N’est-il pas souhaitable que, dans un pays frontière, le bilinguisme, si utile en affaires, soit maintenu ? Pourquoi, sous prétexte de faire acquérir aux enfants la pratique d’une langue nouvelle, leur faire perdre celle de la langue qu’ils parlent déjà ? On me permettra d’écarter tout de suite cet argument d’apparence trompeuse. Je serais le premier à regretter que la connaissance de l’allemand disparût de l’enseignement secondaire et même de l’enseignement primaire supérieur. Mais, à l’école primaire, les maîtres disposent d’un temps trop limité pour pouvoir enseigner aux élèves deux langues