de l’art, toute la peinture hollandaise, à travers le candide Vermeer et le nébuleux Israëls, jusqu’à ce chatoyant Jongkind et à ce fulgurant van Gogh, n’est-elle pas, à le bien prendre, la déduction logique du même théorème et le développement du même axiome fondamental ? Depuis le Fiat lux du rêveur de la Ronde, toute cette peinture apparaît comme la suite d’une journée, tantôt voilée, tantôt éclatante, mais dont toute la beauté est dans le drame de la lumière. Toute l’école, depuis trois siècles, ressemble à un laboratoire où l’on n’aurait fait autre chose que capter, transmuer de l’ombre et des rayons, des ténèbres et du soleil. Telle est l’alchimie dont ces maîtres ont fait leur absolu. Cette poursuite opiniâtre, à travers des erreurs et des incohérences, fait encore le pathétique des nouveaux chercheurs d’or. Voilà, d’un bout à l’autre de son existence, toute l’originalité de cette singulière école : n’ayant à sa disposition que des sujets communs, une terre humble, une nature médiocre, elle invente hors de ce monde un univers aérien, s’y installe, et fait son domaine de l’immatériel et de l’impondérable : découverte merveilleuse, dont toutes les conséquences ne sont pas encore déduites. Et c’est cela qui est proprement hollandais et ne pouvait naître qu’en Hollande : disons-le avec reconnaissance pour la diversité du génie de l’espèce humaine. Quelle réponse au sophisme que la beauté n’a point de patrie !
LOUIS GILLET.