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Inépuisablement, que le nard de la foi
Lave sa chair meurtrie
Et que, sans se lasser, vers l’invisible Roi,
Son angoisse chante et sourie.

Tu lui dis de bénir le vouloir souverain
Qui prépare sa vie à quelque haut exemple,
Car avant de monter jusqu’aux voûtes du temple,
Il faut que l’encens soit écrasé dans l’airain.


LES CLARTÉS ÉTERNELLES


Ta cellule est moins sombre et l’air plus diaphane :
Tu viens de recevoir en présent, aujourd’hui,
Le poème inspiré d’un poète profane :
Quelques feuillets sentant le miel dans un étui.

Ton rêve émerveillé contemple des sirènes,
Des bacchantes dansant sur les coteaux vineux,
Des nymphes inclinant vers les calmes fontaines
Leurs doigts, tendres ainsi que des roseaux sans nœuds.

Mais en vain Aphrodite à de bruyants convives
Jette le myrte pâle où brûlent ses langueurs ;
Mais en vain elle passe au bord des mers lascives,
Parfumant l’univers de ses deux seins en fleurs :

Ses ramiers turbulents dans les buissons de roses.
Les plaintes de la flûte au long des soirs charnels.
Le duvet printanier qu’elle met sur les choses,
Prennent sous tes regards des sens spirituels.

Sous le lin transparent, tu vois naître des ailes
Tu changes la déesse érotique en Psyché,
Et le gazon, qu’elle a de ses pieds blancs touché,
Reste à jamais fleuri de clartés éternelles.

Ta pureté la baigne en un fleuve lustral,
Tu répands sur son corps le baume évangélique,
Et son front, convoité par le Prince du Mal,
Devient un noble ivoire où dort une relique.