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D’HERRADE DE LANDSBERG

POÈME


STANCES LIMINAIRES


Je m’étais assoupi sous des pommiers en fleurs,
Odorantes merveilles,
Caressé par le vol des zéphirs enjôleurs,
Dans des chansons d’abeilles.

Peu à peu mon esprit abandonna mon corps,
Tel un parfum s’envole,
Et je ne vis plus rien des splendeurs du dehors,
Ni clarté, ni corolle :

Tous les ors du matin étaient ternis pour moi,
Et j’étais loin du monde,
Comme un homme serré par un linceul étroit,
Dans la fosse profonde.

Le printemps vainement dansait sur les coteaux,
Et réchauffait les tombes ;
Vainement s’irisait la neige des rameaux,
Et volaient les colombes.

Ainsi qu’un vêtement tout récemment quitté,
Tiède, mais immobile,
Je reposais sur le gazon, dans la clarté
Du matin juvénile.