d’abord. « Pensez-vous, dit-il, que M. Lowe ne me martyrise pas assez, sans que vous veuilliez en avoir votre part ? » Bertrand et Montholon insistent. A la fin, il consent. Au début d’octobre, le 5, à en croire Antommarchi, il livre ses bras, mais Antommarchi ne sait point poser un vésicatoire. Il ignore qu’on y donne une forme, ronde ou ovale, et qu’on rase la place où on l’applique. Il coupe ses deux vésicatoires en carré, les applique sur les bras, et s’en va en ville. L’Empereur, resté au lit, gêné et agacé, fait, à plusieurs reprises, demander son médecin qui n’est pas rentré. Il arrive à la fin, se fait annoncer, demande à l’Empereur comment il se trouve des vésicatoires. « Je ne sais pas, répond l’Empereur. Laissez-moi tranquille... Vous me posez des vésicatoires qui n’ont pas de formes ; vous ne rasez pas la place avant de les appliquer : on ne le ferait pas pour un malheureux dans un hôpital... Ce n’est pas ainsi qu’on arrange un pauvre homme. » Antommarchi veut répliquer. — « Allons, lui dit l’Empereur, vous êtes un ignorant, et moi, un plus grand encore de m’être laissé faire. » Il n’est point facile à soigner, et c’en est là la preuve ; il ne consent que difficilement à accepter un médicament et il en conteste le plus ordinairement l’effet. Pourtant ici, lorsqu’on lève les vésicatoires, il doit reconnaître qu’ils ont produit un effet sur les fonctions digestives et ramené un peu d’appétit. Après quelques semaines de pansement, ils sèchent d’eux-mêmes.
Les journées de l’Empereur se passent en partie dans son intérieur, qu’il tient fermé une partie de la journée ; « s’il sort, c’est pour monter en calèche, ou faire un tour dans le jardin, s’y asseoir et y passer une heure en compagnie du comte de Montholon, ou du grand-maréchal... Cet état d’atonie va en augmentant chaque Jour. S’il rentre de promenade, l’air lui a fait mal ; il passe au billard, et fait tout fermer... L’appétit a disparu... Il ne prend du rôti qu’on lui sert, que la partie rissolée dont il extrait le jus avec son palais, sans pouvoir en avaler la viande ; son bouillon n’est bon qu’à l’état de jus, ce qui devient fort échauffant. »
Antommarchi, même s’il avait eu des connaissances et une pratique médicales, eût été dans l’incapacité de soigner l’Empereur, qui le recevait quelques minutes à peine « sans lui rien dire de ce qu’il éprouvait ; » mais l’incroyable légèreté qu’il portait à réaliser ses impressions, l’amenait tantôt à décider