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maintenant, si claire alors, il répandait au printemps des parfums d’orangers, une fraîcheur d’eau jaillissante ; il étalait les dessins harmonieux de parterres fleuris jusqu’au pied de la terrasse légèrement surélevée, où l’hôtel dressait sa façade édifiée par Mansart. L’hôtel tout entier, avec son ampleur, ses vastes dépendances, le riche ameublement de ses pièces, sa magnifique chapelle, le glorieux tableau que formaient, devant les fenêtres du Nord, la Seine et le Louvre, convenait parfaitement à une princesse du sang.

Le prince et la princesse de Conti donnèrent, le jour même de leur installation, une fête au Dauphin, qui, se trouvant la veille chez M. de Livry, au Raincy, n’avait pu venir les voir à Versailles.

Monseigneur fut reçu, à sa descente de carrosse, par Monsieur le Prince, Monsieur le Duc et le prince de Conti, et tout de suite fut conduit « à l’appartement d’en haut. » La belle lumière de juillet entrait par les fenêtres ayant vue sur le jardin, éclairant la longue enfilade de pièces, au bout de laquelle attendait une collation de fruits et de boissons fraîches. Plus loin, dans un salon rendu obscur, on avait allumé une multitude de lustres, de girandoles et de flambeaux ; et, sur une scène que l’ingénieux Bérain, dessinateur ordinaire du cabinet du Roi, avait entourée de trois amphithéâtres pour l’orchestre ‘et la symphonie, allait commencer ce qui plaisait tant à Monseigneur, un divertissement en forme d’opéra.

Malgré la musique des Lulli, ce divertissement, — un fade épithalame coupé d’entrées de ballets, — serait peu de notre goût d’aujourd’hui. La foule langoureuse des divinités rassemblées sur le théâtre, Junon, Minerve, Apollon, Pluton, la Nuit, l’Hymen, l’Amour, les Songes heureux et les Grâces, paraîtrait bien ridicule, et plus ridicules encore, les vers de M. de La Chapelle, secrétaire des commandements du prince de Conti :


L’Hymen a cent douceurs
Pour un cœur qui l’appelle.
………………
………………
Cédez à votre tour,
Beautés à qui tout cède ;
Des maux que fait l’Amour
L’Hymen est le remède.