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tandis que leur roi Victor-Emmanuel ne leur amenait que le beau temps[1]. »

Dans le roman de Villemer, George Sand se livre à son goût récent pour la géologie. F. Buloz lui écrit, le 27 juillet : « Je n’ai rien coupé de cette géologie ni ailleurs, parce que cela me paraissait très bien marcher, mais je vous ai refait quelques phrases qui m’ont paru défectueuses. Ainsi, permettez-moi de vous le dire, un écrivain de votre ordre ne doit pas écrire : « sa vue (de l’enfant) éveille bien des blessures. » J’ai aussi corrigé des « bêtises superbes, » laquelle expression n’a pas le sens que vous croyez pouvoir lui donner. Rappelez-vous levers de Voltaire dans Œdipe : « J’étais jeune et superbe, etc. » J’ai encore modifié : « J’ai été impressionnée de ce couplet. » Ce mot « impressionner » ne vaut rien ; il faisait jeter les hauts cris à ce pauvre Planche, et on pourrait lui appliquer le joli dialogue de la Marquise qui vient après, sur la signification du mot caractère. J’espère que vous ne me blâmerez pas de vous signaler ces petites inadvertances : vous êtes maintenant dans une voie si haute et si sereine, que je tiens à m’associer quelque peu à vos efforts, en revoyant le plus sérieusement possible vos épreuves. » F. Buloz ajoute ces mots, énigmatiques pour George : « J’espère prochainement vous donner un témoignage qui vous fera plaisir, que ces humbles efforts ne sont pas tout à fait vains. » Ces mots l’intriguent, et l’occupent plus que les corrections ; — d’ailleurs, Villemer ne l’intéresse plus, car elle a commencé un autre roman ; — et comme elle a étudié, pour Villemer, les pierres et les fossiles des époques antédiluviennes, la voici avec Valvèdre plongée dans l’étude si aimée de la botanique. « Mais il faut que j’apprenne beaucoup de choses dont je veux parler sans dire de bêtises, et je ne sais pas comme Balzac prendra juste ce qu’il me faut dans une notion générale. Je me passionne pour les choses où je mets le nez. Aussi j’ai peut-être trois mots de botanique à dire dans mon roman, et me voilà entraînée par l’attrait de la science à m’y remettre d’un bout à l’autre. Autrefois, mon pauvre Malgache me donnait des analyses toutes faites et des connaissances toutes mâchées, voilà pourquoi j’ai oublié. On ne retient que ce qui vous donne beaucoup de peine. Aussi, je retiendrai cette fois-ci, car mon ami n’est plus là. Il herborise

  1. Collection S. de Lovenjoul, 25 juin 1860, inédite.