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troublé où l’Italie achève dans la douleur d’enfanter son unité et de préparer son avenir. Les Français ne concevront jamais d’ombrage des succès qu’elle pourra obtenir, pourvu que ce ne soit pas à leurs dépens ; ils ont confiance que l’Italie ne répudiera pas la latinité, avec laquelle elle a triomphé, pour le germanisme, ennemi séculaire de ses libertés ; on ne concevrait pas qu’il y eût des gibelins dans une Italie démocratique. L’opinion française doit suivre avec attention les nouveaux groupements politiques qui, dans le désarroi ou la disparition des anciens partis, font peu à peu l’ascension du pouvoir : ce sont les socialistes, trop enclins à prendre leur mot d’ordre hors d’Italie et dont l’extrême gauche confine au bolchévisme, mais qui, dans leur masse, constituent tout de même, ou qui deviendront, un parti de gouvernement, car, parmi les Italiens de race, il n’y a jamais de véritables intransigeants ; c’est aussi ce « parti populaire » qui allie l’amour de l’ordre au goût des réformes hardies et qui, en appliquant les enseignements sociaux de Léon XIII, représente bien les aspirations les plus élevées de la masse catholique ; son action politique devient plus énergique et plus efficace à mesure que se rétablissent des relations normales entre le Saint-Siège et le gouvernement du royaume ; aucun ministère ne peut plus se constituer sans son concours ou sa bienveillante neutralité. Le « parti populaire » est une grande force d’avenir et de reconstruction, et ce sera toujours une force guelfe, latine ; entre elle et le peuple français, les affinités naturelles ne resteront pas longtemps obscurcies par des malentendus passagers.

L’ordre balkanique résulte des traités. L’influence allemande est éliminée de la péninsule ; la propagande bolchéviste y est tenue en échec par l’intensité des passions nationales. La Serbie, centre de cristallisation de toutes les fractions de la famille yougo-slave, est devenue, par son union avec la Croatie et la Slovénie et par son accès à l’Adriatique, plus européenne ; elle n’est plus un petit Etat balkanique, mais l’une des premières parmi les Puissances de second rang ; sa conception de l’ordre européen doit s’élargir en même temps que son territoire et ses intérêts. Elle vient de donner une preuve de son esprit politique par son accord avec l’Italie.

La Bulgarie, assagie, désabusée des ambitions inquiètes du roi Ferdinand, fermement conduite par M. Stambouliiski,