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Chronique n° 2132
15 février 1921
CHRONIQUE DE LA QUINZAINE [1]

La visite qu’a faite en France le maréchal Pilsudski, accompagné du prince Sapieha, ministre des Affaires étrangères, et du général Sosnkowski, ministre de la Guerre, contribuera certainement à resserrer entre la Pologne et la France, comme l’a dit M. Millerand, « une entente qui est pour chacun des deux pays un élément indispensable de sécurité et de progrès, et qui constitue pour l’Europe une des plus solides garanties de la paix. » Pour consacrer officiellement cette entente, M. Briand a donné aux Ambassadeurs alliés connaissance d’une déclaration très précise dans sa brièveté. Les mots de sécurité et de paix se retrouvent dans la formule des deux Gouvernements, après avoir été déjà prononcés dans les discours de l’Elysée, et ils sont, en effet, ceux qui expriment le mieux les avantages d’une alliance sincère entre la Pologne et la France. Ce n’est pas qu’il faille négliger, dans l’ensemble des forces qui poussent les deux peuples l’un vers l’autre, la puissance du sentiment et la grandeur des souvenirs communs. Après le discours de M. Jean Richepin à*la Sorbonne, le prince Sapieha, très ému par la chaude éloquence du poète orateur, me disait : « C’est à Paris, c’est dans cette vieille Sorbonne, qui a été jadis si hospitalière pour nos réfugiés, que nous réalisons vraiment notre rêve et que nous avons le mieux conscience de notre résurrection. » Ne dédaignons pas ces liens spirituels, mais comprenons aussi qu’à l’heure présente, nous sommes également unis par des intérêts plus positifs, que définissent, avec une exactitude parfaite, les termes employés par M. Millerand et par le Président du Conseil.

La paix européenne, telle qu’elle est sortie, frêle et chancelante, du traité de Versailles, reposé, en grande partie, sur la constitution d’une Pologne indépendante et forte. Les intrigues auxquelles l’Allemagne

  1. Copyright by Raymond Poincaré, 1921.