mon cœur ! J’apprends qu’il y a entre vous plus de dissensions, qu’il n’y en avait autrefois en Afrique ! Pourtant il me semble que la cause est bien petite et tout à fait indigne de tant de contestations… Toi, Alexandre, tu as voulu savoir ce que tes prêtres pensaient sur un point de la loi ; même sur une partie seulement d’une question, tout à fait dépourvue d’importance ; et toi, Arius, si tu le pensais, tu devais te taire… Il ne fallait ni interroger ni répondre, puisque ce sont des problèmes qu’aucune nécessité n’impose de discuter, mais que l’oisiveté suggère, bons tout au plus à aiguiser les talents. Est-il juste, que pour de vaines paroles, vous engagiez un combat, de frères à frères ?… Ce sont des choses vulgaires, dignes d’enfants sans expérience et non de prêtres ou d’hommes sensés. Redonnez-moi donc, je vous prie, des jours tranquilles et des nuits sans inquiétude, de manière que je puisse aussi dans l’avenir jouir de la pure joie de vivre. »
Le sens de la lettre est clair. Constantin, qui concevait la religion comme un instrument politique pour maintenir l’ordre dans l’Etat, considère la fureur de ces discussions théologiques comme une folie. Une religion qui, au lieu d’aider l’empereur à gouverner, lui créait des difficultés, lui semblait, dans sa fidèle interprétation de la pensée romaine, une monstrueuse absurdité. Et en effet, profitant de l’autorité dont il jouissait parmi les chrétiens, il prit l’initiative d’un grand Concile, qui devait trancher la question. A Nicée, au printemps de 325, se réunirent plus de 250 évêques, en grande partie des provinces orientales. Constantin inaugura le Concile avec un discours assez modeste. En rétablissant, dit-il, la concorde dans l’Eglise, l’assemblée aurait fait une chose agréable à Dieu et rendu un grand service à l’empereur. Le Concile était présidé par un de ses secrétaires, l’évêque Osius, un adversaire de l’arianisme, et les influences impériales se déployèrent toutes pour ce parti.
Arius fut donc encore une fois rebuté. Le Concile décréta que le Christ n’avait pas été tiré du néant, et qu’il n’était pas différent de son père, mais au contraire qu’il avait été engendré par lui « de l’essence du père, » « vrai Dieu du vrai Dieu » et qu’il lui était consubstantiel.
Mais l’illusion d’avoir reconstitué ainsi l’unité morale de l’Empire dura peu. Ce qui à son sens politique de Romain semblait une folie furieuse, était quelque chose de si profond, que toute l’autorité de l’empereur serait impuissante contre