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devait expirer le 18 juillet. Sur la demande instante de l’Émir, le délai fut prorogé, d’abord jusqu’au 19, puis sur une nouvelle insistance de Feyçal, jusqu’au 20 minuit.

Aucune réponse n’étant parvenue à l’heure fixée, les troupes françaises se mirent en marche le 21. Le jour même, cependant, arrivait au quartier général français une acceptation de principe de l’Émir. Le télégramme qui la notifiait était destiné à parvenir la veille, mais il avait été arrêté à un relai par un de ces désordres locaux que Feyçal s’était tellement plu à fomenter contre nous, et qui lui nuisait à son tour.

Poussant jusqu’à ses limites extrêmes sa loyauté légendaire, le général Gouraud voulut néanmoins tenir compte de cette intention, manifestée pourtant trop tard. Il arrêta ses troupes à la fin de leur marche du 21 et attendit que l’Émir sanctionnât ses promesses par des actes ; ces actes escomptés lui étaient précisés d’ailleurs par une nouvelle note.

L’acceptation définitive de ces conditions par l’Émir, et les mesures qui les consacreraient, devaient être acquises pour le 23 juillet minuit.

Un court billet à l’encre rouge, écrit nerveusement de la main même de l’Émir, apportait son refus dans la soirée de ce jour. Feyçal avait signé aussi, le 21, un autre document dont il ne nous destinait certes pas l’original. C’était l’ordre pour ses troupes de la région de Homs de marcher sur les détachements français placés en couverture de la route de Tripoli, dans la zone d’occupation française. Cet ordre fut exécuté, mais c’est un sanglant échec qu’avaient subi les Chérifiens, le 22 juillet, à Tel-Kalah.

Ce qu’il faut retenir avant tout, c’est que, dans le même temps où il implorait la clémence du général Gouraud et faisait appel à sa droiture, Feyçal lançait traîtreusement contre nous ses troupes régulières, en violation de la suspension d’armes que nous lui avions consentie pour le sauver. Voilà quel est l’homme qui a osé aller, le 6 décembre de cette même année, déposer une couronne sur la tombe anonyme du soldat britannique enterré à Westminster !

Le sort en était jeté. Les troupes du général Goybet, qu’assistait le propre chef d’État-major du général Gouraud, le colonel Pettelat, se mirent en route sur Damas le 24 juillet au matin. Elles marchaient à la bataille. Deux divisions chérifiennes leur