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d’Asie, pour avoir dès longtemps consacré à leur étude une grande partie de son activité et tout son beau talent. Au point de vue militaire, une solide garantie était assurée par la présence, comme chef d’État-major de l’Armée du Levant, du colonel Pettelat, qui ajoutait aux titres de son passé militaire celui d’avoir été le premier collaborateur du général Gouraud, pendant l’année de la Victoire, à laquelle la quatrième armée prit une part si décisive.

Les étapes même du nouveau Haut-Commissaire en gagnant son port d’embarquement marquent quelle était, dès lors, l’orientation de ses pensées. Il ne visita point nos arsenaux pour leur demander des obus, il ne sollicita pas sans fin les conseils des diplomates, mais il s’arrêta à Lyon et à Marseille, pour y conférer avec les Chambres de commerce de ces deux villes, dont il reçut un accueil chaleureux. La seconde est la porte de France ouverte sur tout l’Orient et, si l’on ose dire, le premier barreau de l’échelle levantine ; la première est le centre commerçant et industriel d’où sont partis sans cesse les conquérants de la fortune française, dont un des éléments demeure la production de la soie, alimentée par les cocons du Liban.

C’est à Lyon qu’un ami de la Syrie, le maire de la ville, M. le sénateur Édouard Herriot, salua de sa chaleureuse éloquence et de ses vœux celui en qui le pays avait mis sa confiance. Il ne craignit pas d’invoquer, sous l’inspiration de l’histoire, cet autre jeune général que la République d’alors avait envoyé, il y a plus d’un siècle, porter au proche Orient le renom de sa civilisation et de sa science...

Trois jours plus tard, en cette même rade de Toulon où le général Gouraud avait été ramené des Dardanelles par un navire-hôpital, le croiseur cuirassé Waldeck-Rousseau étrennait le pavillon du Haut-Commissaire. Le navire appareillait bientôt parmi les embruns d’une Méditerranée hargneuse. Alors, pour ne pas donner tort à Figaro, et puisqu’en France tout est mis en chansons, plus d’un fredonnait le couplet de la reine Hortense, devenu plus tard le séditieux refrain des violettes impériales : « Partant pour la Syrie... »

II. — LES PREMIÈRES DIFFICULTÉS

On arriva le 21 novembre. La mer s’était apaisée. La veille, la première pluie de la saison, si espérée dans le pays, était