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IMPRESSIONS DE ROUMANIE

Les amis que nous avons en Roumanie, — c’est-à-dire, dans l’ordre des choses intellectuelles, sinon des politiques, tous les Roumains — aiment à recevoir les échos de la pensée française. Ce peuple est si imprégné d’atavisme romain et de culture latine qu’à travers la vaste Europe, tout ce qui de France arrive jusqu’à son âme, fait vibrer celle-ci singulièrement, de même que le moindre frémissement d’un diapason fait, à travers l’espace, résonner un autre diapason accordé avec lui.

A cet égard, nos amis roumains sont d’un tel éclectisme que le moindre commis-voyageur de la pensée française, si peu de chose qu’il représente, est toujours désiré et accueilli par eux comme s’il portait dans sa valise tous les trésors de je ne sais quelle Golconde de l’esprit. C’est à cela que je dois d’avoir découvert tout le charme de cette lointaine et captivante Dacie, au cours d’une récente mission que le gouvernement français et le gouvernement roumain tinrent tous deux sur les fonds baptismaux et dont je voudrais dire ici quelques-unes des vives et délicieuses impressions.

Avoir visité dans chaque recoin les confins de la Voie lactée, à l’aide de ce véhicule idéal qu’est la pensée armée d’un puissant télescope, et ne point connaître la proche, l’étrange Europe est une imprudence impardonnable que j’avais hâte de réparer. L’astronome de la fable, — qui en ce temps lointain avait la chance d’être encore un astrologue, — la paya jadis en tombant disgracieusement dans le puits qui gisait à ses pieds. Si encore ce puits avait été celui où se dissimule, dit-on, la Vérité, mon archaïque confrère s’en fût, je pense, consolé. Mais tel ne fut point le cas, à en juger par tous les mystères que le ciel n’a