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développement de toutes les valeurs humaines du pays, — et c’est là que les initiatives françaises se différencient vraiment et à fond de tout ce que les organisations ultérieures ont pu réaliser.

Après quinze ans, il y avait déjà en Rhénanie une tradition, un esprit industriel, une communauté de méthodes. De Spire à Clèves, de Sarrebruck à Trêves et à Aix-la-Chapelle, une solidarité s’était établie. Le Rhin commençait à devenir une frontière. Détail qui ne laissera pas de faire sourire, les industriels rhénans accusaient leurs confrères d’outre-Rhin de fabriquer de la camelote. C’est ce que l’on voit, en lisant la pétition que la Chambre de commerce de Crefeld adressa au Gouvernement impérial pour protester contre l’incorporation du grand-duché de Berg à la France.

Et bien tard dans le siècle allait se prolonger, sur le Rhin, un véritable culte des industriels pour le grand Empereur. Comme les vétérans de la Grande Armée, comme Clément Brentano dont nous avons entendu les accents enflammés à propos de Napoléon restaurateur des congrégations charitables, les industriels de la basse vallée du Rhin s’enthousiasment au souvenir des quinze années impériales. Tout comme un grognard, le père de Mevissen conserva toute sa vie le souvenir des quatre mots qu’en 1811, à l’exposition de Dusseldorf, il avait échangés avec le Héros. On regrette que le professeur à l’Université de Bonn Holzhaussen, qui se préoccupe de rechercher les traces du culte pour Napoléon sur le Rhin, et qui a dépouillé à cet effet toute la série des poètes, ait négligé les témoignages caractéristiques de la fidélité des Chambres de commerce à la mémoire de leur fondateur[1].


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Quand les Français furent partis, les Chambres de commerce, les sociétés locales et les notables s’efforcèrent de continuer l’œuvre de la France. Les Chambres de commerce demeuraient pénétrées de la doctrine qui avait présidé à leur création et des idées qui avaient été déposées dans leurs assises mêmes. Elles restaient dirigées par des hommes de formation française. Celle d’Aix-la-Chapelle, par David Hansemann, qui avait fait

  1. Consultez par exemple sur ce culte napoléonien le livre consacré par Mathieu Schwan à la Chambre de commerce de Cologne.