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« Pagello est un ange de vertu qui mériterait d’être heureux… c’est pourquoi je ne devrais pas le réconcilier avec L’Arpalice (une maîtresse).., je passe avec lui les plus deux moments de ma journée à parler de toi. Il est si sensible et si bon cet homme, etc. » Qu’en dites-vous, M. Babou ?

M. Clouard a écrit : « Paul de Musset prit, comme il le devait, la défense d’Alfred. Sans rien dire à personne, il envoya Lui et Elle au Magasin de Librairie, dirigé par Charpentier. » Mais nous avons vu que Paul de Musset avait fort bien proposé son roman à F. Buloz, avant de le porter à Charpentier.

F. Buloz assura à George que Lui et Elle n’avait aucun succès. Pourtant, si ce pamphlet fut blâmé par beaucoup de gens, il eut, comme Elle et Lui, ses défenseurs, et d’abord les amis de Paul, cela va sans dire. J’ai sous les yeux quelques-unes de leurs lettres, qui sont certainement hostiles à George et à l’œuvre de George. Voici d’abord une lettre de Mélesville, le vaudevilliste :

« Courage, mon digne et brave ami ! » écrit-il à Paul, continuez à démasquer cette odieuse créature, qui s’enveloppe dans sa robe d’innocence, et se drape audacieusement dans ses impostures. Votre rôle est noble et facile. Il importait au frère d’Alfred de Musset de porter la lumière dans le cloaque immonde et calomnieux, de venger une cendre à peine refroidie, et que, plus que tout autre, cette femme devait respecter en se respectant elle-même. »[1]

Voici encore une lettre de Mme Jaubert, la tendre marraine de Musset, sa confidente, son amie ; elle prend vivement le parti du filleul, cela est bien ; mais comme elle accable George ! Sa véhémence semble même démasquer une certaine rancune féminine…

« Vous avez réussi ainsi à faire connaître au monde tel qu’il était (elle s’adresse aussi à Paul), ce poète incomparable, si envié des uns, si calomnié par Elle. Vraiment il parle par votre voix dans tous les dialogues. C’est bien lui, — aussi le faites-vous aimer de celles qui ne l’ont jamais connu.

« Ma fille, mes compagnes de voyage[2]ne craignent pas de

  1. M. Charavay, Lettres autographes et documents historiques — Mars-avril 1915. N° 791.36.
  2. Mme Jaubert voyageait alors avec des amis ; sa lettre est datée de Vernou-sur-Brenne.