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textuellement ce qu’il nous avait dit à Spa, qu’il ne peut sans danger désarmer l’Einwohnenvehr et la Sicherheitspolizei.

Comment M. Théodor Wolff peut-il donc écrire dans le Berliner Tagblatt que, si M. Leygues a envoyé à l’Allemagne la note du 31 décembre, c’est parce qu’il s’est montré docile aux exigences des militaristes français? M. Otto Braun lui-même, le président du Conseil prussien, ne vient-il pas de proclamer à Kœnigsberg que c’est au contraire le ministre allemand de la défense nationale qui cède à l’esprit militariste et que les manœuvres de l’Orgesch mettent en péril l’existence de l’État? Je ne veux pas douter que le Conseil Suprême ne prenne les mesures nécessaires pour mettre fin à un état de choses que beaucoup d’Allemands eux-mêmes commencent à trouver paradoxal. Si le Conseil, se réunissant près de trois semaines après le terme fixé pour le désarmement définitif, se laissait aller à de nouvelles complaisances, nous en serions réduits à penser que la convention de Spa n’a été qu’une mystification.

Mystification très coûteuse, du reste, en ce qui concerne le charbon. C’est encore un sujet que le Conseil Suprême sera obligé de reprendre, puisque le système imaginé à Spa ne doit pas être, et nous devons nous en féliciter, appliqué au-delà du 31 janvier. Mais les Allemands nous avertissent déjà qu’ils vont se livrer à de nouveaux marchandages. Depuis le jour où nous avons lâché la rampe que nous offrait le traité de Versailles, il nous faut descendre les marches plus vite que nous ne voudrions. Si socialiste que soit le Vorwaerts, il prend ardemment la défense de l’industrie allemande et il prétend que le charbon livré par l’Allemagne nous permet de faire à nos voisins une concurrence abusive. Des dommages causés à nos régions envahies, le Vorwaerts a déjà perdu la mémoire. Notez que ces accords de Spa, dont j’ai plusieurs fois signalé les graves inconvénients, le Reich n’a même pas daigné les exécuter. Bien qu’en 1920 l’extraction totale du bassin de la Ruhr ait dépassé de plus de seize millions de tonnes les chiffres de 1919, l’ensemble des livraisons effectuées par l’Allemagne pour les cinq derniers mois de l’année a été inférieur de cinq cent mille tonnes au total fixé par le protocole de Spa. Les Allemands attribuent ce déficit à la baisse du Rhin et au manque de wagons. Mais, comme ils s’attendent à ce que nous leur proposions, une fois de plus, d’assurer nous-mêmes les transports par chemin de fer, ils s’empressent d’ajouter qu’à partir du 31 janvier, ils ne pourront fournir le tonnage demandé par la Commission des réparations, c’est-à-dire deux millions deux cent