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pour y recevoir les différents hôpitaux dispersés à travers la ville. Il y aura là 150 lits, dont 50 pour les pauvres et 100 pour les soldats. Mais comment seront-il desservis ? On se tourne vers la Lorraine voisine. Monseigneur Mannay, évêque de Trêves, un Alsacien, demande aux sœurs de Saint-Charles, à Nancy, que huit d’entre elles descendent la Moselle. Les négociations furent longues. Enfin le 1er avril 1811, ces religieuses arrivent à l’hôpital de Trêves. Les premières sur le Rhin ! C’est une date mémorable dans l’histoire de la charité rhénane. L’étincelle a jailli ; le foyer de charité française, une fois allumé, va répandre sa chaleur et peu à peu ses flammes, à travers toute la Rhénanie L’administration impériale ne pourra achever son œuvre qu’à Trêves, mais Trêves servira de modèle à toutes les œuvres rhénanes. C’est à juste titre que dans la salle d’honneur de l’hôpital Saint-Irmin, aujourd’hui encore, préside le portrait de Napoléon Ier.

Les préfets impériaux, dans toute la Rhénanie, sont étroitement accordés avec la pensée du maître.

A Coblence, il y a Lezay-Marnesia. C’est un Lorrain, qu’on a bien connu à Strasbourg, où sa statue maintient sa mémoire. Par sa sensibilité, il appartient profondément aux pays mosellan et rhénan de cette époque. Un des premiers admirateurs de Schiller, dont il avait traduit le Don Carlos, il renseigna Mme de Staël sur l’Allemagne. On entre mal dans son état d’esprit, si l’on ignore son amitié pour le fameux pasteur Oberlin et pour la mystique Mme de Krudener. Ce dont un tel homme fut capable, quand les bourgeois du département de Rhin et Moselle voulurent satisfaire leur cœur, comment il les encouragea et les guida, vous l’imaginez, et d’ailleurs tous les historiens rhénans lui donnent leur témoignage. L’annaliste de Coblence, Wegeler, écrit qu’il était « entouré du respect et de l’estime de tous, » et admire « la sagesse et la bienveillance de ses interventions ; » le poète Clément Brentano enregistre que « la population l’aimait pour son souci de servir le bien public, pour sa bienveillance toute paternelle à l’égard de ses administrés, pour son abord facile, et qu’il a mérité par son œuvre l’éternelle reconnaissance des pauvres et des amis des pauvres. » Lezay-Marnesia obtint de Napoléon pour la ville de Coblence les bâtiments de l’ancien couvent des Franciscaines, à charge d’y fonder un hôpital, qui fut ouvert aux pauvres le 9 novembre 1805. On eût