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nombreux conflits, la question dans le sens qui, selon vos avis, devait tout pacifier. » (Thiers à Manteuffel, 2 décembre 1871.) — Il serait aisé de continuer la comparaison, mais en voilà assez, je pense, pour que nous ne puissions oublier avec quelles différences ont été exécutés, par la France et par l’Allemagne, les traités de Francfort et de Versailles.

Nous devons donc nous tenir sur nos gardes, et c’est ce qu’a proclamé le Président du Conseil. Mais, a-t-il ajouté, contre l’Allemagne en grande partie désarmée, nous restons aujourd’hui assez forts pour ne pas craindre la réduction à dix-huit mois du service ; militaire. Les projets déposés par le Gouvernement ont été soumis au Conseil supérieur de la guerre, dans lequel siègent les maréchaux Joffre, Foch et Pétain, les généraux Humbert, Maistre, Berthelot, Guillaumat, Nivelle, Mangin, Debeney, de Boissoudy, Dégoutte, Buat, Fayolle, Franchet d’Esperey; et ce conseil les a approuvés à l’unanimité. L’eût-il fait, si ces projets avaient pu nous affaiblir et compromettre l’autorité de la France? Le général de Castelnau, qui avait questionné M. Leygues devant la Chambre, a remercié le Président du Conseil de ses déclarations rassurantes et une interpellation qui a suivi s’est terminée par un ordre du jour de confiance, voté à une très forte majorité. M. André Lefèvre n’en a pas moins tenu à libérer sa conscience dans un débat ultérieur: il a prononcé un discours très émouvant, où il a montré les vaincus déchirant le traité de Versailles; et de toutes les observations échangées est résultée l’impression très nette que l’Allemagne perfectionne tous les jours son camouflage pacifique. Que conclure de ces discussions passionnées, sinon que nous sommes obligés de concilier, pour le moment, les exigences de notre défense nationale avec celles de notre situation financière et économique? Même diminuées, nos charges militaires resteront encore lourdes. Tout en conservant les garanties nécessaires, épargnons notre budget et rendons à la terre, comme à l’usine, le plus grand nombre possible de jeunes travailleurs. Le rôle de l’homme d’État est, non pas de choisir entre de grands intérêts contraires, non pas de les sacrifier les uns aux autres, mais de les harmoniser en faisant à chacun d’eux la part que réclame le bien permanent du pays.

Toutes ces économies réalisées, il restera cependant dans l’état de nos finances un point très noir, que M. Ribot a signalé, l’autre jour, avec beaucoup de force : c’est le budget spécial des dépenses recouvrables en exécution des traités de paix. Comme l’a remarqué