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la série illimitée des années. Le déficit d’un exercice ne s’en va pas avec les vieilles lunes; il s’inscrit au compte des découverts du Trésor, il gonfle notre dette flottante, et il aggrave, par conséquent, le mal permanent de nos finances. Une politique prévoyante doit donc considérer, derrière le budget de l’année prochaine, ceux qu’il faudra dresser ensuite, et ne pas rejeter imprudemment sur demain les embarras d’aujourd’hui. Sans une implacable volonté d’économies, nous allons à des désastres. Le dernier emprunt a donné, nous répète-t-on, des résultats qui font grand honneur à l’activité de notre pays et à son esprit d’épargne. Cela est vrai. Mais les dépenses des derniers mois avaient presque entièrement dévoré, par avance, l’argent frais qu’ont apporté les souscripteurs, et, quel qu’ait été le succès de l’émission, notre trésorerie va, dans le mois de janvier, se retrouver fort à l’étroit. Les administrations publiques ne paraissent pas se rendre compte du péril. Les ministres continuent à multiplier les fonctionnaires; les fonctionnaires continuent à réclamer l’augmentation de leurs traitements; les services constructeurs se laissent entraîner à des majorations de prix trop souvent injustifiées; et, dans cette course générale à la dépense, personne n’ose plus crier : « Halte là! » ou du moins la voix de ceux qui ont encore ce courage se perd dans le tumulte joyeux des coureurs.

Les Chambres cependant se sont plus particulièrement préoccupées de deux points, sur lesquels le gouvernement a été invité à s’expliquer : ne pouvons-nous réaliser des économies en Orient? Ne pouvons-nous, en France même, alléger nos charges militaires?

À ces deux questions, M. Georges Leygues a répondu affirmativement. Il a exprimé l’espoir qu’un prompt rétablissement de la paix avec la Turquie nous permettrait de retirer progressivement nos troupes de Cilicie et qu’en Syrie nos dépenses seraient réduites au minimum par l’organisation d’administrations locales, dont les frais seraient imputés sur les revenus du pays et que nous nous bornerions à contrôler. Malheureusement on a déjà créé, pour la Syrie, un corps de fonctionnaires français très dispendieux et rien, en revanche, n’a encore été fait pour assurer sur place la perception régulière des impôts. Ceux d’entre nous qui souhaitent le plus vivement que, non seulement le grand Liban, mais la Syrie tout entière, reste sous l’influence de la France, doivent s’efforcer d’empêcher que de mauvaises méthodes ne viennent écraser nos budgets, inquiéter l’opinion et décourager la France dans les premiers efforts de sa politique orientale. Nous ne sommes dans le Levant, ni pour y annexer