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— Ah ! New-York, New-York, combien peu tu marches dans la voie de l’Esprit ! Mr Archer, je vois que vous connaissez Mr Winsett ?

— Oui, je suis arrivé jusqu’à lui, il y a quelque temps, mais pas par la voie de l’Esprit, répliqua Winsett avec un sourire caustique.

La marquise secoua la tête avec réprobation…

— Qu’en savez-vous, Mr Winsett ?… L’esprit souffle où il veut…

— Où il veut, répéta le docteur Carver d’une voix vibrante.

— Mais asseyez-vous donc, Mr Archer. Nous avons eu un délicieux petit dîner, tous les quatre, et ma chère enfant est montée s’habiller. Elle vous attend. Elle sera ici dans un moment. Nous admirions ces fleurs merveilleuses, qui la surprendront quand elle entrera.

Winsett resta debout.

— Il faut que je me sauve. Veuillez dire à Mme  Olenska que nous sommes bien attristés de son départ. Cette maison a été une oasis…

— Elle ne vous abandonnera pas. La poésie et l’art font partie de sa vie. Vous êtes poète, Mr Winsett ?…

— Pas précisément. Mais je lis quelquefois des vers, dit Winsett, saluant le groupe du seuil de la porte.

— Il est si spirituel !… Ne trouvez-vous pas qu’il est spirituel, docteur Carver ?…

— Je ne m’occupe jamais de ce qui est spirituel, répondit sévèrement le docteur Carver.

— C’est qu’il est sans pitié pour nos faiblesses, Mr Archer : il ne vit que de la vie de l’âme ; ce soir il prépare mentalement une conférence qu’il doit faire tout à l’heure chez les Blenker. Docteur Carver, auriez-vous le temps, avant de partir chez les Blenker, d’expliquer à Mr Archer votre lumineuse découverte sur le « Contact Direct ? » Mais non, je vois qu’il est près de neuf heures, et nous n’avons pas le droit de vous retenir quand tant de gens aspirent à vous entendre…

Le docteur Carver parut légèrement désappointé de cette conclusion, mais ayant comparé l’heure de sa massive montre avec celle de la petite pendule de Mme  Olenska, il se prépara à partir.

— Je vous verrai plus tard, chère amie ? dit-il à la marquise, qui répondit avec un sourire : — Dès que la voiture