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de dette; elle n’acceptera de retards dans les paiements que s’il lui est donné des gages et des garanties ; elle entend que l’Allemagne ne se joue pas plus longtemps des Alliés en se ruinant par les dilapidations budgétaires et par la fabrication des assignats; elle demande que soit institué un contrôle sérieux des finances allemandes, des exportations et des devises. Personne ne pensera que des questions de cette sorte, dont la discussion exige du sang-froid, de la compétence, de l’attention, puissent être convenablement étudiées suivant la procédure habituelle du Conseil suprême. Il serait fâcheux que les premiers ministres alliés crussent en avancer la solution en les traitant dans des discours alternés, prononcés soit devant leurs Parlements respectifs, soit devant un nouvel aréopage international. Qu’ils fassent préparer le travail par des hommes de métier, qu’ils se rencontrent, s’ils le veulent, pour mettre eux-mêmes la dernière main à la tâche, mais qu’ils sacrifient aux besognes silencieuses les séances d’apparat et les tournois oratoires.

Restent les affaires d’Orient. Elles ne sont pas encore en voie d’arrangement, mais, pour les simplifier, mieux vaut peut-être ne pas faire monter les muezzins sur les minarets. Le langage qu’a tenu Lord Curzon à l’United Wards Club était certainement inspiré par un sincère désir de conciliation; il a cependant produit une impression assez pénible dans la plupart des milieux français, tant il est vrai que les déclarations publiques faites ainsi par les hommes d’État d’un pays sur des sujets brûlants peuvent toujours être mal interprétées chez les nations amies. En ces temps ingrats, les paroles ne sont que monnaie de papier; il n’y a de standards solides que dans la réflexion et le travail. L’émotion qu’ont causée en Angleterre les accords d’Angora s’est accrue sous l’influence de la crise égyptienne et de la rupture des négociations engagées entre le Foreign Office et la mission d’Adly Pacha. La crainte qu’éprouvent nos voisins de trouver, un jour, devant eux la route des Indes fermée ou semée d’obstacles les a rendus un peu chatouilleux dans leurs premières appréciations de textes, parfois trop hâtivement rédigés, mais faciles à préciser ou à rectifier. Lord Hardinge, qui a toujours été un sincère ami de la France, et M. de Saint-Aulaire, dont l’expérience et le tact sont très appréciés à Londres, ont déjà contribué, l’un et l’autre, sous la direction de leurs Gouvernements respectifs, à purger cette petite querelle de ce qu’elle avait eu, d’abord, d’un peu aigre.

Quelles que soient les erreurs de forme et de méthode commises dans les négociations, M. Briand a des arguments décisifs à fournir