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entrée dans la pratique, dans le domaine public, dans l’application, qu’elle a en un mot maintenant droit de cité.

Il y a quelques jours les passagers du Paris revenant de la Conférence de Washington causaient déjà avec la France alors que le navire était encore à des centaines de kilomètres de la côte, et plus que toute autre cette expérience a appris aux Français l’existence réelle de cette merveille : la téléphonie sans fil. C’est peut-être après tout parce que le Paris portait dans ses flancs un des plus habiles et des plus éloquents porte-voix qui soit en notre pays de verbe sonore. Car les choses sont ainsi faites chez nous, que les acteurs nous intéressent plus que la pièce et que tel chef-d’œuvre n’a eu l’aumône d’un regard qu’à cause de la cravate de l’interprète.

En fait, le poste de la Tour Eiffel a déjà commencé depuis quelque temps à faire pour le compte de l’Administration des P. T. T. des émissions téléphoniques sans fil. Bien que l’appareil employé ne soit encore que d’assez faible puissance (1 kilowatt environ), le paquebot Paris a pu entendre les émissions jusqu’à 1 500 kilomètres grâce à un récepteur perfectionné.

Avant d’expliquer comment on obtient ces résultats merveilleux qui seront bientôt dépassés, quelques mots marquant les étapes antérieures de la découverte doivent trouver leur place ici.

Il semble que les premiers essais de téléphonie sans fil aient été faits il y a de longues années déjà par le Danois Poulsen au moyen d’un arc de son système. Poulsen est cet inventeur ingénieux dont on a pu admirer, à l’Exposition universelle de 1900, le « Télégraphone, » ce singulier appareil à la fois enregistreur et émetteur de son et qui, lorsqu’on parlait devant lui, enregistrait la voix sur une lame de métal aimantée en mouvement qui, déroulée à nouveau plus tard, restituait fidèlement les paroles gardées par elle électriquement et sans l’empreinte purement mécanique des phonographes ordinaires.

Poulsen a eu d’autre part l’idée de faire de la T. S. F. au moyen des ondes qu’émet dans des conditions déterminées un arc électrique parcouru par un courant. Les ondes hertziennes ainsi obtenues ont une grande fixité, une continuité excellente, en quoi elles sont supérieures aux ondes saccadées et rapidement amorties qu’émet l’étincelle électrique ordinaire. L’arc de Poulsen a marqué une étape importante dans les progrès de la télégraphie sans fil, et c’est avec cet appareil que Poulsen fit les premiers essais couronnés de succès de téléphonie sans fil.

Ces essais, malgré leur succès, ont d’ailleurs manifesté de