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écoute un excellent professeur, M. Pressoir, discourir à la distribution des prix de « la poésie française et de l’amour de la patrie. »

En 1881, élève de quatrième, il atteint au deuxième prix de français et parmi bien d’autres nominations dont je ne donne pas le détail (il est huit fois nommé), il maintient une supériorité en histoire, qui s’affirme jusqu’à la rhétorique par un premier prix inébranlable. Le poète de la Princesse lointaine, de Cyrano, de l’Aiglon, qui devait renouveler le drame historique en vers, avait déjà, on le voit, un goût très vif pour les évocations du passé. En troisième, il ajoute à ce premier prix d’histoire le premier prix d’excellence et le premier prix de français, qu’il détient encore en seconde. En rhétorique seulement, ses succès faiblissent un peu ; fatigue, changement de maîtres, programme plus abstrait de la rhétorique ? je ne sais ; autant d’explications possibles ; en tout cas, il conserve deux solides positions, le deuxième prix de français, et toujours le premier prix d’histoire.

Le palmarès du lycée de Marseille n’en dit pas plus long. Car l’an d’après, en 1885, à dix-sept ans, Edmond Rostand est devenu à Paris un élève du Collège Stanislas. Mais en somme, il sortait bien pourvu de littérature et de connaissances solides de ce lycée de Marseille, d’où s’étaient envolés avant lui d’autres élèves de marque : Adolphe Thiers, le poète Joseph Autran, les Méry, Elémir Bourges, Ferdinand Brunetière, J. Ch. Roux, Reyer, Lacour-Gayet, Camille Jullian, et bien d’autres depuis, qui ont compté dans la vie de leur cité et dans celle de la France.

Des anecdotes ont circulé, qui voulaient représenter Rostand comme un médiocre élève, fantaisiste et paresseux : il n’en est rien, on le voit. Une légende chère à l’opinion veut que tout poète ait été méconnu par ses premiers maîtres ; celui-ci a été de bonne heure considéré comme un esprit très fin et très lucide, tenant avec avantage la tête de sa classe.

Tel il est apparu aussi à ses maîtres de Stanislas, parmi lesquels M. René Doumic, dont l’amitié l’a depuis suivi dans toute sa carrière. Ce que Rostand fut à Stanislas, M. Doumic l’a dit ici même[1]. Ce n’est pas mon sujet. Mais je dois

  1. Voyez la Revue du 1er décembre 1919.