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son époque et de celle d’Alexandre Ier une étude approfondie. Ces travaux étaient devenus sa vie même[1]. Pendant les longs séjours qu’il faisait dans sa belle propriété de Borjom, dans les montagnes du Caucase, presque seul, ne voyant que de rares amis, il passait son temps à lire, à déchiffrer des manuscrits, à écrire : il était heureux.

Sa collection d’objets de l’époque napoléonienne était riche en miniatures, portraits, tableaux, meubles, marbres, bronzes et porcelaines. Il en avait fait deux parts : en vertu de son testament, toute la partie relative à la France devait revenir à la Malmaison, tandis que tous les objets se rapportant à la Russie iraient au Musée Alexandre III de Pétersbourg.

En histoire naturelle, guidé par les directeurs du Musée de Tiflis, les docteurs Gustave Radde et Gustave Sievers, il s’était adonné spécialement à l’étude des papillons[2]. Il fit tout exprès un voyage aux îles Canaries à la recherche d’une espèce rare. Sa collection devint une des premières d’Europe. Il l’avait léguée à l’Académie des Sciences de Pétersbourg.

D’esprit très libéral, autant que de manières affables, sa porte était largement ouverte à quiconque avait besoin de renseignements d’histoire. Il recevait son monde avec une urbanité qui lui était particulière. Sa simplicité était proverbiale : il détestait tout ce qui était étiquette et formalité ; les réceptions officielles étaient pour lui autant de corvées. D’une générosité sans égale, il était toujours prêt à obliger : il ne savait pas refuser. Il était bon, souverainement bon ; si parfois il se laissait emporter par de brusques colères, elles étaient de courte durée, chez lui, le repentir venait tout de suite, et il effaçait tout ; il réparait sa faute en magicien, et c’est l’offensé qui se sentait confus et fautif envers lui.

Très sensible aux beautés de la nature, sa contrée de prédilection, c’étaient les montagnes du Caucase : il y avait passé

  1. Le grand-duc Nicolas Mikhaïlovitch a publié : Les princes Dolgorouky, 1 vol. — Le comte Paul Stroganow, 2 vol. — Les portraits russes des XVIIIe et XIXe siècles, 5 tomes, à 4 livraisons chacun. — L’Impératrice Elisabeth Alexievna, 1 vol. — L’Empereur Alexandre Ier, 2 vol. — Relations diplomatiques entre la Russie et la France d’après les rapports des Ambassadeurs des Empereurs Alexandre Ier et Napoléon, 8 vol. — Correspondance de l’Empereur Alexandre Ier avec sa sœur la grande-duchesse Catherine Pavlovna, 1 vol. — Les Aides de camp généraux de l’Empereur Alexandre Ier, 1 vol.
  2. Le grand-duc Nicolas a publié des Mémoires sur les Lépidoptères en 9 volumes illustrés.