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Pologne ne voulaient pas s’entendre ou n’y parvenaient point ?

Les Alliés auraient pu répondre que, si les combinaisons économiques échouaient, la frontière n’en resterait pas moins tracée. C’eût été le plus logique et le plus simple. Mais l’Allemagne reprochait au Cabinet britannique de n’avoir pas tenu vis-à-vis d’elle les promesses de lord d’Abernon et elle espérait bien que les deux questions resteraient jointes, de manière à conserver la liberté de tout faire sombrer. La Conférence des ambassadeurs a alors été invitée par les Gouvernements à faire un bloc des deux décisions et à laisser le plus de temps possible aux négociations, de manière à en favoriser l’issue et à éviter ainsi qu’on essayât de revenir sur le partage territorial. » Mais elle s’est d’abord heurtée au paragraphe 6 de l’annexe de l’article 88 : « Aussitôt que la ligne frontière aura été fixée par les principales Puissances alliées et associées, la Commission notifiera aux autorités allemandes qu’elles ont à reprendre l’administration du territoire qui serait reconnu comme devant être allemand ; lesdites autorités devront y procéder dans le courant du mois qui suivra cette notification, de la manière prescrite par la Commission (la Commission interalliée que préside le général Le Rond). Et le paragraphe ajoute : « Dès que l’administration du pays aura été assurée respectivement par les autorités allemandes ou polonaises, les pouvoirs de la Commission prendront fin. » Ainsi, la frontière une fois fixée, la Commission interalliée a un mois pour assurer l’installation des autorités allemandes et polonaises ; après quoi, elle n’a plus qu’à disparaître.

Comment croire que, dans un espace de temps aussi bref, la Pologne et l’Allemagne puissent réaliser l’entente économique demandée ? Sur les indications officieuses du Conseil de la Société des Nations, la Conférence des ambassadeurs a trouvé un biais assez ingénieux. Elle a constaté que, d’après l’article 87, la Commission était constituée pour « fixer sur place » la ligne frontière ; elle a donc estimé que le délai d’un mois devait courir, non pas de la Communication générale qui pouvait être faite à la Pologne et à l’Allemagne, après adoption d’une ligne théorique par les Gouvernements alliés, mais de la notification qui devait avoir lieu après détermination matérielle de la frontière sur le terrain litigieux. Opinion très sensée, d’ailleurs, et conforme à l’esprit du Traité. Les pouvoirs de la Commission ont été ainsi prolongés pour une durée inconnue, ce qui a, sans doute, l’inconvénient de retenir encore nos troupes dans un pays effervescent, mais ce qui donne à la Pologne et à l’Allemagne le temps de mûrir leurs accords ou leurs dissentiments. Souhaitons que cette machina-