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— Vous voyez, petites enfants… Ne regrettez pas la terre, car dans la vie, ça finit toujours comme ça…

— Voyons Foolit, disait le Seigneur indulgent mais un peu vexé, voyons Footit, n’exagérez donc pas…


LA XVIe EXPOSITION DES AUTOMOBILES

— Les automobiles, la vitesse, les voyages… Ne songez-vous pas aux voyages ?

— « Mon enfant, ma sœur, Songe à la douceur… »

Madame, s’il vous plaît, ne m’écrasez pas… Que cette foule est impolie ! que ces gens sont brusques et dangereux, comme des moteurs sans phares !

— C’est ainsi. A peine ai-je eu le temps à la porte, de payer mon humble taxi ; tant pis pour la monnaie : « Circulez… circulez, » et autres objurgations moins courtoises.

— La politesse, hélas ! Mais il ne faut pas être pressé pour être poli. La courtoisie demande de petits loisirs. Tenez, voilà un autre concours à organiser pour l’Œuvre…

— Puisque politesse il n’y a plus, vous m’ennuyez avec votre politesse… Regardons plutôt les voitures. Imaginons-nous…

— Quoi ?

— Que je vais vous en offrir une.

— C’est-à-dire qu’il n’y a que moi qui vais me l’imaginer. Mais laissez-moi d’abord m’imprégner de cette fameuse nouvelle poésie des machines : vous savez bien Kipling…

— Pierre Hamp, et surtout Alexandre Arnoux dans cette adorable nouvelle la Nuit de Saint Barnabé.

— Je fais ce que je peux pour subir le charme, mais ça ne me subjugue pas, ce grand hall, par le vitrage duquel tombe une chaleur implacable, cette poussière soulevée par tous ces pas, cette convoitise sur ces visages luisants dont la sueur sûrement sent déjà le pétrole.

— Peste ! à votre tour de n’être pas polie ! D’ailleurs, ce ne sont pas les humains que vous devez contempler, mais bien les autos : toutes ces vitesses au repos, toutes ces forces encore sans âme. Où iront-elles ? dans quel pays ? quels voyageurs entraîneront-elles ? Je vous assure qu’il y a là des motifs d’imagination et de rêve, tout comme ailleurs.