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Ordinairement on se sauve du ridicule par l’insolence ; il les a réunis indissolublement.


Mai (?).

Je disais hier : « Je ne sais que le Pape qui, après avoir lancé une bulle, ait le droit (le faire baiser sa mule. » — ; Je me refuse à la présentation.


Mai (?).

La question est pour moi de savoir par la suite des conversations de quelle vengeance ou de quelle haine M. Molé s’est fait l’exécuteur.

Il peut y avoir :

1o  Haine de femmes vieilles et dédaignées ;

2o  Haine d’auteurs envieux ;

3o  Haine du Roi même, à qui Villemain aura transmis mon refus de la pairie pensionnée, humiliant marché en échange d’un éloge que je n’ai pas fait dans mon discours.


Juillet 1846.

Sur un bal de la Cour.

Ce bal a été troublé par les rumeurs du peuple du faubourg Saint-Antoine le long des boulevards.

Lorsqu’un uniforme dégénérai passait, le peuple criait : « Cubières, tu vas acheter un ministre ! » — À un uniforme d’État-major : « Gudin, tu vas voler au jeu ! »

On les avait instruits et ameutés pour ces insultes.

Le bal en prit un aspect d’abord un peu troublé.

La reine Christine était, ainsi que sa fille, entourée d’Espagnols. Narvaez a l’aspect d’un caporal d’infanterie, gros, lourd, coiffé d’une perruque notre comme d’un bonnet de soie, — brodé littéralement sur toutes les coutures d’un uniforme qui le presse comme l’écaille d’une tortue.

La plus belle des princesses est la Duchesse de Nemours.

La Duchesse d’Aumale a une distinction royale et bourbonienne dans le visage, et ses cheveux, d’un blond pâle, la font ressembler aux portraits des infantes d’Autriche de Murillo.

La Duchesse de Montpensier ressemble à une petite grisette française, visage rond et air commun dans les rues de Paris.


A. de Vigny.