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Cet Heimatdienst, dont l’action occulte se trouve ainsi démasquée, n’est autre que le succédané du fameux office de presse de guerre (Kriegspressamt), dont l’activité fut si intense jusqu’à l’armistice. Son but officiel est de maintenir la fidélité au gouvernement du Reich. Son but véritable est de détruire l’œuvre de Versailles et de soulever les masses ouvrières, sous des prétextes économiques, contre la France. Sur l’un des agents arrêtés, notre sûreté aux armées a découvert d’ailleurs ces instructions suggestives :

« Il est particulièrement nécessaire d’exploiter dans un sens politique les grèves qui sont provoquées par l’irritation contre les autorités françaises, par le manque de charbon, par la famine… Il est nécessaire qu’une certaine tension soit maintenue entre la population et les autorités françaises, afin que ces dernières reculent devant les moyens extrêmes, qu’elles aient le sentiment net que la population n’entre pas dans leurs vues. Il est à recommander que la propagande soit dirigée sans dureté contre l’Angleterre ni contre l’Amérique. »

Ces troubles, s’ils se produisent, ramèneront la vague spartakiste à Berlin. Mais pour sauver le butin de la grasse Rheinland, le Prussien mettrait le feu au monde. Il n’épargnera mensonges, dépenses, ni violences afin d’éviter que les Rhénans ne disposent d’eux-mêmes et ne traitent les Français en amis. Pour déloyale qu’elle soit, cette action n’est pas maladroite. Les ouvriers, s’ils ont faim, écouteront tous les propos de colère. L’hiver leur sera sans doute dur : des usines, faute de matières premières, annoncent qu’elles chômeront, la récolte ne peut suffire à cette population dense, la fièvre aphteuse désole le bétail rhénan… Les prix hausseront encore.

Puissions-nous assurer à ces Rhénans les vivres que Berlin leur refuse ! Quand nous leur offririons toutes les richesses de notre commerce, tous les charmes de notre esprit, comment les arracherions-nous aux mauvais bergers de l’Est, s’ils n’ont pas de quoi manger ? Pour les Français des pays occupés autant que pour la population, un ravitaillement abondant, voilà bien, je crois, la première nécessité.


12 juillet.

Après bientôt un an de séjour, voici le retour en France. Cette fois, c’est une vraie frontière qui m’en sépare : il faut