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seul à même d’accomplir, il a eu besoin de collaborateurs sûrs et dévoués. M. Georges Leygues a été l’un des plus précieux, parce que, dans toutes les circonstances graves, soit pendant la guerre, soit au moment de l’armistice, soit pendant les négociations de paix, il s’est prononcé, sans hésitation, pour la solution française. Je lui dois ce témoignage, à l’heure où il reçoit, des mains du Président de la République, un mandat redoutable.

Tant à l’intérieur qu’à l’extérieur, la tâche qu’il a assumée est une des plus lourdes qui puissent incomber à un chef de gouvernement. Sans doute, la défaite que les extrémistes viennent d’essuyer au Congrès d’Orléans, les vigoureux réquisitoires qu’ont prononcés M. Merrheim et M. Jouhaux contre le régime bolchéviste, le désaveu infligé à la IIIe internationale, écartent de nous la menace brutale et immédiate d’une révolution à la russe ; mais la nécessité de veiller au respect des lois n’en reste pas moins impérieuse pour les hommes qui ont la responsabilité de l’ordre public, et les majoritaires eux-mêmes ont laissé échapper à Orléans des paroles qui ne sont pas faites pour rassurer entièrement ceux qui ne voient pas dans la haine de classe et dans la force aveugle les instruments providentiels du progrès. Puis, le nouveau gouvernement va se trouver, comme le précédent, en face de difficultés financières dont la solution n’a été que trop longtemps ajournée et qu’il y a urgence à régler. Dans la discussion du budget de 1920, le ministre avait déclaré qu’il comptait déposer avant les vacances parlementaires le projet de budget de 1921, de façon que la commission de la Chambre se mît au travail pendant l’intersession et que les débats pussent commencer dès la rentrée. M. F. Marsal a tenu cette promesse autant qu’il dépendait de lui ; c’est-à-dire qu’avant la première séparation, il a déposé sur le bureau de la Chambre une belle feuille blanche de grand format. Après quoi, il a profité des loisirs que lui laissait l’éloignement des sénateurs et des députés pour demander à ses collègues du cabinet leurs propositions de dépenses. Elles ont été, comme toujours, formidables et, comme toujours, le ministre responsable des finances publiques a insisté pour que les chiffres fussent révisés et réduits. Les mois d’août et de septembre n’ont pas suffi à apaiser cette querelle classique et, la Commission des finances de la Chambre, inquiète de ces lenteurs, a réclamé, comme c’était son droit, qu’on se décidât enfin à mettre un peu d’encre sur la feuille blanche. Elle ne peut commencer sa besogne, sans être saisie d’un projet gouvernemental, et les retards auxquels elle a été condamnée l’empêcheront, sans doute, de préparer ses rap-